Le 22 juin 1942, Pierre Laval disait, dans un discours radiodiffusé, qu’il souhaitait « la victoire de l’Allemagne ». Au moins, les choses étaient claires : c’était là la pensée, la volonté, de tous les « collaborateurs », ces nazis français, et cette phrase, bien logiquement et heureusement, ne lui fut pas plus pardonnée que tant d’autres vilénies de sa part, lui, le zélé pourvoyeur de Juifs et de résistants aux camps de la mort nazis, lui, le corrompu jusqu’à l’os.
Mais, admettons. Comme dans toute Uchronie, il faut examiner ce qui fait la substance du célèbre roman de Philip K. Dik, « Le maître du Haut Chateau », l’hypothèse d’une victoire nazie (et de ses alliés) à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, et les conséquences d’une telle victoire.
Une telle hypothèse inclut nécessairement une double défaite : celle de l’URSS sur le territoire européen, celle des Etats-Unis par ailleurs. Allemands et Japonais se seraient partagés la Terre dans des proportions gigantesques – les Italiens devant se contenter de miettes. Mais surtout, la « solution finale » serait vraiment devenue, finale, terminale : les Juifs auraient tous et toutes (sauf exceptions) été assassinés. Il en aurait été de même des malades mentaux, mais aussi des communistes, des anarchistes, des libertins/libertaires, des Tziganes, et de tous les autres opposants. Et les Français ? Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, les Français vivent dans l’illusion que les camps d’extermination étaient réservés à des ennemis spécifiques d’Hitler et des nazis, à commencer par les Juifs, mais il s’agit d’une illusion, parce qu’ils oublient que, selon Hitler, et il l’a écrit dans « Mein Kampf », la France et les Français étaient les PREMIERS ennemis de l’Allemagne, avec les Juifs. Or, en cas de victoire militaire nazie, la mégalomanie et la violence personnelle d’Hitler auraient pris des proportions inouïes, puisqu’il se serait considéré comme le maître du monde, de toute la Terre, d’une Terre dans laquelle toute opposition susceptible de le renverser aurait été, de facto, anéantie, à la racine. La victoire des Alliés a donc SAUVE les Français, mais ils vivent comme si cette menace existentielle n’avait pas existé. Et du coup, ils permettent que des jeunes en France se réclament et du nazisme, et soutiennent la « théorie du grand remplacement », alors que ce fut LE projet du nazisme : remplacer les populations non aryennes, par des populations aryennes. A l’Est d’abord, mais une fois l’Est occupé, cela aurait été le tour de l’Ouest, et les Français auraient disparu de la surface de la Terre. Les Français sont donc les survivants d’un projet, avorté, de colonisation. Et après 1945, l’inconscience de ce projet et de cette menace a rendu possible le maintien d’une colonisation française à travers le monde par des actes tout à fait identiques à ceux que les Nazis ont commis en France. Et cette même inconscience favorise la légèreté par laquelle cette expression du « grand remplacement » est discuté en France. Mais il n’est pas étonnant de trouver, encore, des « Français » de pacotille, exprimer leur « nazisme » ou leur sympathie pour, puisqu’il s’en est trouvé beaucoup entre 1940 et 1945. Il y a donc eu des Français qui, au « nom de la France », ont oeuvré chaque jour à sa disparition – et qui continuent d’applaudir à ce projet. Et un certain nombre d’entre eux font grand bruit, au point d’avoir réussi à obtenir d’avoir un candidat à l’élection présidentielle… en plus d’une candidate. Trahir et détruire la France ? Cela se bouscule.
Amazon a produit cette série, à partir du roman de PKD. Quid de la France et des Français selon ? Ce point semble être absolument ignoré.