Avec les commémorations, des émissions, des films, etc, les jeunes et moins jeunes citoyens des pays d’Europe de l’Ouest ont été conviés à un systématique « devoir de mémoire » – à intégrer et répéter la formule, mais surtout pas à, fouiller, chercher, interroger. Qu’il s’agisse de ces commémorations, émissions, etc, le résumé du message officiel, qu’il soit explicite ou implicite, fut, est : ce qui s’est passé est ce qu’il y a eu de pire, ce fut tragique, la cause est que « l’homme peut aller au mal », « se donner au mal », et, une fois ces généralités exprimées, il faut revenir à la vie sociale et économique. Les cours d’Histoire donnent lieu à la diffusion de « légendes », comme sur une large Union internationale anti-nazie, allant des USA jusqu’à l’URSS; que le débarquement en Normandie a été le plus grand fait militaire des batailles en Europe, que la défaite nazie est à mettre sur le compte de l’engagement américain, etc. Ces légendes laissent penser que l’engagement américain contre le nazisme fut rapide, évident, motivé par des bons sentiments. La défaite de l’armée française est attribuée à la stratégie et aux moyens militaires allemands, de la Blitzkrieg à l’action conjuguée d’un armement supérieur, en chars, avions, etc. Or, toutes ces croyances, qu’elles soient explicitement énoncées ou qu’elles soient implicites, comptent de nombreux présupposés, qui sont faux, inexacts, partiaux. Du coup, les années 30 deviennent étranges, jusqu’à être inintelligibles. La « victoire des Alliés » a été telle contre cette entreprise criminelle que les Européens ont vécu dans l’idée hégélienne d’une sursomption, d’une intégration/disparition de cette Histoire et que l’Histoire ne pouvait se répéter. Cette idée n’est pas complètement fausse. Ce qui a eu lieu ne se reproduit, ne se reproduira pas, tel quel. L’Allemagne, actuelle, ne semble pas compter dans ses rangs un nouvel Hitler. Mais si les faits et les êtres ne se reproduisent pas, à l’identique, des processus fondamentaux se répètent. Dès lors, dans la mesure où il y a des continuités, des répétitions, des « logiques », on peut répondre à un penseur allemand qui affirme « On dit aux gouvernants, aux hommes d’Etat, aux peuples de s’instruire principalement par l’expérience de l’histoire. Mais ce qu’enseignent l’expérience et l’histoire, c’est que peuples et gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire et n’ont jamais agi suivant des maximes qu’on en aurait pu retirer.« , c’est qu’il est particulièrement étonnant qu’un chantre de l’intelligibilité, de la « dialectique dans l’Histoire » ait pu ainsi affirmer que nous ne pouvons pas nous instruire par l’expérience de l’Histoire, comme si chaque situation était si particulière, spécifique, que toute comparaison avec d’autres situations dan l’espace et dans le temps, serait vaine. D’autant que ce penseur, Hegel, ne fait pas ce qu’il dit. Plutôt que d’interdire une conscience éclairée et critique sur cette Europe, sur cette Allemagne, sur ce Nazisme, en tant qu’organisation criminelle, organisation faite par et pour le crime, il faut chercher à éclairer les conditions, les moyens, le sens, sans se perdre dans des oppositions idéalistes abstraites, comme entre « la civilisation » et « la barbarie ». Par exemple, il faut éclairer le lien qui existe entre ce territoire, l’Europe, la production et l’usage d’un grand nombre d’armes, par des groupes spécifiques, qu’ils soient dit « légitimes », polices, armées – ou non, mafias. Il faut également interroger le rapport entre « religion » et « nazisme », dans la mesure où la notion de « pureté » provient de théologiens, chrétiens. Enfin, il faudra également, en plus d’autres nouvelles perspectives, étudier la persistance d’un Nazisme, de militants, d’idéologues, de financiers, après la Seconde Guerre Mondiale, en Europe.
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