Dans cet entretien avec Salomé Saqué, Thomas Piketty prolonge ses analyses et propositions antérieures, en les complétant, en les justifiant à nouveau. On peut dire que pour TP, il faut qu’il y ait une égalité REELLE, et que celle-ci passe par de vraies réformes structurelles. Ce qu’il propose est une part de « l’idéal ». Mais le problème est que TP n’explique pas comment il entend aller vers cet idéal, puisqu’il évoque seulement les forces et les groupes sociaux qui s’y opposent et s’y opposeraient. En outre, dans son propos, il y a des généralités, à plusieurs reprises. Par exemple, il évoque plusieurs périodes à l’occasion desquels il y a eu des progrès réels dans « l’égalité réelle », par exemple, « la Révolution Française ». Mais l’Histoire de cette période démontre que si une égalité EN DROIT a été posé, par différence avec ce qui était écrit dans le droit de l’Ancien Régime, ce droit est resté abstrait, puisque, à une aristocratie de naissance, cette période a permis l’apparition d’une aristocratie complémentaire, de fortune. Et avec le couplage de ces deux aristocraties, les inégalités au 19ème siècle sont devenues plus importantes, se sont aggravées. Enfin, si les connaissances économiques de Piketty sont, évidemment, nombreuses et essentielles, il manque également une réflexion philosophique sur les sujets tout aussi essentiels que sont l’appropriation qui créé la « propriété privée », la typologie des régimes (il caractérise seulement la Chine par un pouvoir politique impérial), une comparaison analytique de l’enrichissement au fur et à mesure de l’Histoire. Enfin, dans son propos, on entend, en creux, des critiques adressées à Lordon, comme celles qu’il lui avait adressé lors de ce débat ci-dessous, qui fut mouvementé – et à l’occasion duquel Lordon ne s’est pas gêné pour lui en adresser. Mais quand on y réfléchit, les deux hommes ne parlent pas de la même chose, et ce qu’ils disent l’un et l’autre se complètent plus qu’ils ne s’opposent. Et ce parce que Lordon prend en compte radicalement et totalement la résistance des classes capitalistes à tout dépassement du capitalisme.
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