Racisme social : Etats-Unis, le cas emblématique du Wisconsin, où les Républicains organisent le non-vote de millions d’habitants

Ci-dessous, vous trouvez un extrait d’un article de “Les Jours“, de Corentin Sellin, sur “Trump, le vengeur masqué“. Nous avons donc un Etat/des Etats qui revendiquent d’être, une/des démocratie(s), et qui, dans le même temps, organise(nt) des difficultés, des obstacles ou des interdictions, de vote, à des millions de personne, en raison du double principe de racisme social/racisme.

‘Face à ce fiasco, beaucoup se sont interrogés sur la raison de l’obstination des républicains à maintenir cette journée électorale, dont l’enjeu principal, aux yeux de la nation, était la primaire démocrate entre Joe Biden et Bernie Sanders. D’autant que, au lendemain du vote, le second a annoncé qu’il abandonnait la course. Mais une fois encore, c’est le président Trump lui-même qui a fourni la réponse. Dans un tweet, il s’est réjoui que puissent se tenir les différents scrutins dans le Wisconsin. Car, parallèlement à la primaire démocrate, avait lieu ce 7 avril l’élection d’un juge à la Cour suprême de l’État. Et c’est au candidat républicain, Daniel Kelly, en course pour sa réélection, que le président des États-Unis tenait à apporter un vibrant soutien.  La nationalisation de cette controverse locale par Donald Trump a pour première vertu de rappeler l’importance cruciale du Wisconsin pour lui. L’État du Midwest est l’un des trois qui, avec la Pennsylvanie et le Michigan, a basculé d’extrême justesse en sa faveur en 2016, alors qu’il votait démocrate depuis longtemps aux présidentielles. Mais le Wisconsin est aussi un État pionnier de l’offensive républicaine destinée à restreindre l’accès au vote. En 2011, le gouverneur conservateur radical Scott Walker, porté au pouvoir par la vague des Tea Party anti-Obama de 2010, est l’un des tout premiers à faire voter par les chambres républicaines du Wisconsin une loi contraignant les électeurs à présenter un document d’identité homologué avec photo pour pouvoir voter, alors qu’un permis de conduire ou un numéro de Sécu suffisent d’ordinaire. L’entrée en vigueur de cette loi en 2015, après bien des recours, correspond à une baisse notable de la participation électorale dans le Wisconsin, surtout parmi des votants traditionnellement favorables aux démocrates – les Afro-Américains, les Hispaniques, les pauvres –, qui ont plus de mal à se procurer les documents d’identité requis. Une étude menée en 2017 par trois universitaires politistes a en effet documenté cette « suppression du vote des minorités » induite par ces lois. Et lors du duel entre Donald Trump et Hillary Clinton en 2016, selon une autre étude du Center for American Progress, le taux de participation des Afro-Américains dans le Wisconsin a chuté de 18,9 points par rapport à 2012. Le combat des républicains du Wisconsin pour tenir à tout prix l’élection en pleine pandémie et pour limiter le vote par correspondance s’inscrit donc dans le contexte d’une décennie de lutte pour restreindre l’accès au vote afin, selon eux, de se protéger des fraudes électorales. En novembre dernier, Justin Clark, le chef juriste de la campagne 2020 de Donald Trump, était venu dans l’État pour informer les responsables républicains locaux que la surveillance des bureaux de vote par ses services serait plus agressive. Et surtout, il reconnaissait – ses propos ont été enregistrés à son insu puis révélés par l’agence Associated Press – que les républicains ont toujours «traditionnellement» compté sur la restriction d’accès au vote.

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