Les contractuels : les médias les évoquent beaucoup, les réseaux sociaux en parlent beaucoup, mais les concernés ont rarement la parole. Pourtant, il n’y a rien de mystérieux, sauf si on ne veut pas vraiment connaître son sujet. Un(e) contractuelle est un travailleur, une travailleuse, en CDD. Dans le droit du travail, des entreprises “privés”, les CDD sont “encadrés”, limités (on parle du droit, et pas du fait), dans le temps. Officiellement, l’Etat promeut plutôt les CDI que les CDD, mais en fait, par ces contrats, par l’apprentissage, par les stages, par les “contrats de mission”, l’Etat français soutient la CDDisation des salariés, autant dans le public que dans le privé. Donc, évidemment, les CDD de l’EN n’engagent aucune continuité. A la fin du CDD, il peut y avoir un réemploi, mais il n’y a aucune garantie, et quand il n’y a pas réemploi, c’est le chômage.
Les propos publics concernant les contractuels les associent systématiquement à l’emploi : on recrute, on embauche, des contractuels. Mais il n’est jamais question de chômage. Pourtant, ces 10 dernières années, l’EN a fait appel à des centaines de milliers de contractuels. Or, il n’y a aucun chiffre sur : ceux qui ont été systématiquement réemployés jusqu’à aujourd’hui (et qui dès lors sont en CDI puisqu’ils ont dépassé les 6 années requises par une loi, la loi Sauvadet), ceux qui, en cours, ont été, pour une bonne ou mauvaise raison, remerciés, ceux qui, au bout du CDD, bien qu’ils aient donné satisfaction (disait-on) n’ont pas été réemployés, ceux qui ont reçu l’indemnisation chômage quand c’était le rectorat concerné qui leur versait, ceux qui ont reçu l’indemnisation chômage avant la contre-réforme Macron, et ceux qui ont reçu l’indemnisation chômage depuis.
Donc, il n’est pas exact de dire que l’EN recrute des contractuels : ce Ministère organise un turn-over maximum avec les contractuels. Qui sera le moins payé, qui demande le moins ? Vous avez une place. On entend déjà certains dire : c’est pas vrai, je connais des contractuels qui ont été réemployés, et… Oui, il y en a, mais ce n’est pas la majorité, on parle ici de tendances. Les départs de contractuels ne se font pas seulement par le non réemploi : le Ministère réussit aussi à, comme pour les titulaires, en dégoûter certains, qui préfèrent essayer d’avoir une vie économique plus épanouie, mieux payée et reconnue. Pour résumer : s’il y bien un recrutement de plus en plus développé de contractuels, ces travailleurs en CDD ne bénéficient pas d’un engagement durable ni constant ni garanti, et beaucoup sont contraints de ne pas continuer à travailler. Des Rectorats qui voyaient de tels CDDisés s’approcher des 6 années de contrat comme requis par la loi Sauvadet, et qui, de ce fait de droit, devaient transformer les CDD en CDI ont mis fin au contrat, afin que les 6 années consécutives à temps plein ne soient pas effectuées. Et une fois un délai passé, les mêmes rectorats ont pu proposer à ces mêmes travailleurs de revenir avec une ancienneté effacée (celle qui concerne le passage de CDD en CDI). Et il y a aussi des rectorats qui ont mis fin à des CDI. Bien que des contre-réformes l’aient affaibli, diminué, le droit du travail en France est bien meilleur dans le privé que dans le public. D’autant que, en cas de problèmes, un travailleur du privé peut saisir un Conseil des Prud’hommes (et là aussi les contre-réformes les ont affaiblis et ont favorisé les syndicats de collaboration, CFDT, CFTC, CGC), alors qu’un travailleur du public doit saisir le Tribunal Administratif, instance de droit peu connue pour être très favorable aux travailleurs.
Avec cette rentrée scolaire 2022, le Ministère de l’Education Nationale fait appel à des contractuels, parce qu’il manque de titulaires. Et, officiellement, le Ministère serait même enclin, via certains rectorats, à favoriser certains contractuels, en les faisant passer en premier pour un poste, en promettant une titularisation qui ferait d’eux des titulaires et plus des contractuels… Mais une fois l’effet d’annonce, le Ministère semble avouer que le concours “exceptionnel” serait réservé aux contractuels du premier degré, alors que le contingent le plus important de contractuels se trouve dans le… second degré. Bref : ce n’est pas demain que les contractuels seront traités comme ils le méritent, par la reconnaissance de leurs diplômes, de leur expérience, de leurs compétences. Parce que, avant l’été, des Rectorats ont prétendu recruter des gens pas compétents (pas formés dans une discipline), et pas formés (formés à la rentrée en deux jours), pour être en poste à la rentrée. Ce choix méprise tout le monde : les titulaires, les contractuels qui ont les diplômes et l’expérience, les élèves, les parents. Et si les titulaires et les contractuels en poste pouvaient se disputer, ce serait toujours cela de pris pour éviter que la prochaine mobilisation annoncée dans l’EN ne soit forte.
En fait, en France, le plan néolibéral continue son déploiement. L’administration la plus ciblée, attaquée, est l’Education Nationale. D’autres le sont, mais différemment. Les travailleurs de l’Education Nationale, et singulièrement les professeurs, auront été, depuis quatre ans, attaqués à tous les niveaux : par une novlangue (on vous aime alors qu’on vous marche dessus), par des droits, comme les droits syndicaux, en régression, par une loi Blanquer de la défiance, par la stagnation-régression des salaires (les plus bas des pays riches), par la contre-réforme Blanquer, avec l’instauration du lycée des menus, avec des matières un peu avantagées et d’autres désavantagées (pertes d’heures). Pour ne pas recruter des titulaires, les places au concours ont été réduites et une part des places n’a pas été attribuée. Les bureaucrates des établissements ont vu leurs prérogatives accrues, vers la “managérisation” générale, autrement dit, la maltraitance générale : selon que vous serez nommé(e) dans un établissement dirigé par une personne respectable et respectueuse, ou par un sadique, votre vie sera… Pour confirmer ce refus de recruter, des heures supplémentaires obligatoires ont été imposées et des heures supplémentaires facultatives ont été proposées – et proposer à des travailleurs mal payées de gagner plus est une procédure garantie de succès. Les effectifs des classes ont été augmentés jusqu’à 35 et même parfois plus. Le cocktail néolibéral a donc atteint une partie de ses objectifs, dont des suppressions de postes. La rentrée 2022/2023, dans le cadre d’une économie plombée par l’inflation, et par la volonté thatchérienne du gouvernement de continuer sur la même voie des violences politiques diverses, s’annonce inédite, très tendue, avec des potentialités de mobilisation autant positives que négatives.
Sur l’encadrement réglementaire des CDD par le droit européen, cf cette publication de la CFDT où il est écrit ceci : “
– des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ;
Sur la notion de « raisons objectives » : la CJCE est venue préciser que cette notion requiert que le recours au CDD, tel que prévu par une règlementation national, soit justifié par l’existence d’éléments concret tenant notamment à l’activité en cause et aux conditions de son exercice (CJCE, 4.07.2006, Adeneler, C-212/04).
Ainsi, le droit communautaire fait-il obstacle à l’application d’une réglementation nationale qui interdit d’un façon absolue, dans le seul secteur public, de requalifier en CDI une succession de CDD qui en réalité ont eu pour objet de couvrir des besoins permanents et durables de l’employeur. Ces CDD doivent être considérés comme abusifs (§ 105 de l’arrêt).
– la durée maximale totale de contrats de travail à durée déterminée successifs ;
– le nombre de renouvellements de tels contrats de travail.
La CJUE a récemment reconnu que la directive 99/70 s’oppose à toute réglementation nationale qui permet le renouvellement de CDD pour couvrir des besoins provisoires de l’employeur en termes de personnel, alors que ces besoins sont en réalité permanents et durables (7).”
Bonjour,
voici, en vrac, des bribes de vécu d’enseignants contractuels.
Le contractuel c’est 6 ans de CDD sans interruption de plus de 4 mois avant d’espérer obtenir un CDI. 6 ans de précarité, 6 ans pendant lesquels tu ne peux pas te projeter. Tu démarres à 24 ans en CDD et si tu es TRES chanceux, ce qui est rare, voire exceptionnel, tu peux espérer un CDI à 30 ans…
Le contractuel alterne donc périodes de contrat et périodes de chômage. La récente réforme va le précariser davantage et lui faire perdre des droits, en durée et montant d’allocation, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les recrutements futurs.
Par ailleurs, le chômeur subit des pressions pour accepter les propositions d’emploi qui lui sont faites. Si tu ne veux plus enseigner mais qu’on te le propose, tu n’as pas toujours le choix. Tu acceptes pour ne pas perdre ton droit aux allocations de retour à l’emploi.
Le contractuel qui approche les 6 ans se voit souvent privé de contrat, ce qui l’empêchera d’accéder au CDI .
Des contractuels lauréats du concours mais recalés lors du stage de titularisation sont à nouveau embauchés en tant que contractuel.
Les rectorats imposent une visite d’inspection préalable au passage au CDI, pourtant la loi est claire: 6 ans de CDD = CDI. Dans les faits, il arrive que le contractuel enseigne plus de 7 ans sans la moindre visite conseil.
Le salaire est inférieur à celui d’un titulaire, pour un même travail. Les contractuels qui ont un certain niveau de diplôme (doctorat par exemple) / une certaine expérience pro pour les LP peuvent percevoir un salaire supérieur à celui d’un titulaire (à ses débuts ?).
Les contrats peuvent prendre fin avant les vacances, si tu es nommé sur un autre poste après les vacances, tu en censé préparer les cours tout en percevant des ARE (a chômage mais au boulot, ce qui est illégal) quand tu peux y prétendre.
Pour ne pas perdre son ancienneté, le contractuel en CDD va accepter un poste même à temps incomplet, même s’il est très éloigné de chez lui.
Le CDI n’est pas l’équivalent du CDI du privé. Le jour où l’inspection se passe mal, le jour où tu n’as pas l’heur de plaire, tu es viré.
Un contractuel peut être en CDI avec une quotité de 5 heures par exemple, ça ne choque personne…s’il veut compléter ces heures, il doit en demander l’autorisation…
Le contractuel doit se rendre dans l’établissement indiqué par le service gestionnaire du rectorat. Certaines académies font formuler des voeux qui sont rarement respectés. Il peut exister des académies qui laissent les contractuels choisir leur lieu d’affectation mais elles sont peu nombreuses et concernent des disciplines très déficitaires.
Le contractuel en fin de contrat doit batailler pour obtenir l’attestation employeur qui lui permettra de s’inscrire à Pôle emploi, certains abandonnent tellement c’est long. C’est quasiment une constante, quelle que soit l’académie.
Personne ne te prévient que le premier salaire est versé avec des mois de retard. Les rectorats te conseillent de contracter un prêt si tu ne peux pas faire autrement ou de solliciter l’établissement qui aurait une enveloppe, souvent ça fait marrer les chefs.
Le contractuel est censé construire ses cours sans ressources (pas de manuel, pas d’audio, rien).
Le contractuel est souvent prévenu de son affectation une fois la rentrée passée.
Le contractuel n’est pas formé, mis à part des sessions de 3 jours tous les 3 ans environ, au cours desquelles on te refourgue un millier de liens en ligne et où, irrémédiablement, tu bosses en groupe pour construire un chapitre.
L’hostilité des collègues titulaires est de plus en plus flagrante et parfois se manifeste ouvertement (surtout depuis que les médias relaient la com du MEN (job dating et autre…, il n’y a pas de job dating, le recours aux contractuels a toujours existé et si on ne fait rien, cela risque de devenir la norme…)
Certains titulaires se comportent en chefaillon, dénigrent, on a eu le cas d’une collègue contractuelle qui s’est vue interdire par sa collègue titulaire de parler la langue natale des parents non francophones et qui voulait imposer l’anglais lors des échanges auxquels elle assistait…
Les camarades contractuels extra-européens ont de très gros problèmes pour obtenir les documents nécessaires à l’autorisation de travailler, c’est un stress quotidien pour eux.
La contractuelle va se sentir obligée de cacher sa grossesse pour ne pas déplaire, ce qui génère un grand stress parmi nos camarades, certaines vont jusqu’à modifier leur date de congé maternité afin qu’elles coïncident avec une rentrée par exemple…
Les contractuels n’ont pas d’ISSR, même s’ils sont affectés sur plusieurs établissements.
Les contractuels n’ont pas droit au congé longue maladie (ils ont droit à un congé grave maladie cependant, il est moins avantageux).
Le contractuel enseignant est très peu représenté au niveau des syndicats…il est lui même très peu souvent syndiqué du fait de son manque de visibilité professionnelle et de sa précarité. Pourquoi s’engager au sein d’un syndicat si tu ne sais pas si tu seras encore là dans 2 mois ?
On le présente souvent comme docile alors qu’il est précaire…
Du point du vue d’une majorité de titulaires ou majorité qui s’exprime sur les réseaux: On tolère que les contractuels subissent des conditions de travail plus que dégradées parce que -au mieux- on l’imagine passer et réussir un concours un jour ou l’autre, ce à quoi son contrat le ne contraint pas, et quand bien même, dans l’intervalle, aucun travailleur ne devrait avoir à subir ces condtions., au pire, on le considère comme une anomalie, voire un traître, un complice de la casse du service public, quelqu’un qui restera si peu de temps qu’il peut bien supporter d’être maltraité par un employeur peu scrupuleux.
Tout cela, j’en oublié, c’est certain, a déjà fait l’objet d’un livre noir des contractuels https://www.lemonde.fr/education/article/2011/11/25/le-grand-malaise-des-precaires-de-l-education_1609283_1473685.html c'était en 2011, plus de 12 ans.
Les contractuels sont majoritairement des femmes. Certaines sont donc contraintes de faire avec une charge mentale qu’on imagine très lourde, pendant des années. La précarité use et fragilise, nos vies et celles de nos familles.
Soutien également à nos collègues AESH ! aux AED ! et aux agents techniques. Soutien aussi à celles et ceux qui souffrent du travail ou de son manque, aux chômeurs, aux précaires, dans et hors EN.
SB
Bonjour, et merci pour ce commentaire.”Le contractuel c’est 6 ans de CDD sans interruption de plus de 4 mois avant d’espérer obtenir un CDI.” Donc, c’est si 6 ans, si… Parce que nombre n’ont jamais atteint les six ans, tout en ayant une expérience conséquente, par exemple, trois, quatre ans, d’autres, au contraire, dépassent largement les 6 ans, mais sans la continuité requise. La législation votée avec la loi Sauvadet est donc extrêmement perverse. Et, la loi Sauvadet est censée avoir terminé sa durée de validité. Et maintenant ? Pourquoi les services juridiques des OS n’ont rien à dire ? sans compter rien à faire, notamment par une action collective… “6 ans de précarité, 6 ans pendant lesquels tu ne peux pas te projeter. Tu démarres à 24 ans en CDD et si tu es TRES chanceux, ce qui est rare, voire exceptionnel, tu peux espérer un CDI à 30 ans…” : cette CDDisation, elle concerne des contractuels, de 30 ans, d’autres de 40 ans, d’autres de 50 ans. Hélas, nous n’avons pas, à leur sujet, une enquête sociologique. Peut-être faudrait-il lancer une bouteille à la mer… Les pages Facebook pourraient permettre, tout en protégeant les données personnelles, d’élaborer des données statistiques significatives.
“Le contractuel alterne donc périodes de contrat et périodes de chômage. La récente réforme va le précariser davantage et lui faire perdre des droits, en durée et montant d’allocation, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les recrutements futurs.” En effet, avec les changements de principe pour les calculs au chômage, tous les travailleurs en CDD et notamment avec des CDD courts, vont perdre beaucoup. Ce sont des milliards économisés sur le dos de ces CDDisés.”Par ailleurs, le chômeur subit des pressions pour accepter les propositions d’emploi qui lui sont faites. Si tu ne veux plus enseigner mais qu’on te le propose, tu n’as pas toujours le choix. Tu acceptes pour ne pas perdre ton droit aux allocations de retour à l’emploi”. En effet : il y a une quasi obligation à accepter, sinon, disparition des listes, et chômage long qui commence… “Le contractuel qui approche les 6 ans se voit souvent privé de contrat, ce qui l’empêchera d’accéder au CDI” : en plus, des rectorats qui perçoivent l’approche de cette “deadline” en profitent pour mettre des contractuels au chômage, ce qui est dégueulasse au possible. “Des contractuels lauréats du concours mais recalés lors du stage de titularisation sont à nouveau embauchés en tant que contractuel.” Ce qui démontre la volonté de maintenir en précarité, alors qu’une législation européenne interdit de précariser pour des emplois permanents. L’Etat français ne respecte pas cette obligation. “Les rectorats imposent une visite d’inspection préalable au passage au CDI, pourtant la loi est claire: 6 ans de CDD = CDI. Dans les faits, il arrive que le contractuel enseigne plus de 7 ans sans la moindre visite conseil.Le salaire est inférieur à celui d’un titulaire, pour un même travail. Les contractuels qui ont un certain niveau de diplôme (doctorat par exemple) / une certaine expérience pro pour les LP peuvent percevoir un salaire supérieur à celui d’un titulaire (à ses débuts ?).” En effet, c’est un point qui est souvent ignoré lorsque, notamment dans les médias, on entend parler des contractuels, c’est que certains ont un niveau de diplôme supérieur à des collègues titulaires, mais dans le système français actuel, cela ne représente rien. “Les contrats peuvent prendre fin avant les vacances, si tu es nommé sur un autre poste après les vacances, tu en censé préparer les cours tout en percevant des ARE (a chômage mais au boulot, ce qui est illégal) quand tu peux y prétendre. Pour ne pas perdre son ancienneté, le contractuel en CDD va accepter un poste même à temps incomplet, même s’il est très éloigné de chez lui”. Et avec les contre-réforme Blanquer, les demandes peuvent être de plus en plus excessives, puisqu’il y a une raréfaction des postes dans de nombreuses disciplines. “Le CDI n’est pas l’équivalent du CDI du privé. Le jour où l’inspection se passe mal, le jour où tu n’as pas l’heur de plaire, tu es viré. Un contractuel peut être en CDI avec une quotité de 5 heures par exemple, ça ne choque personne…s’il veut compléter ces heures, il doit en demander l’autorisation… ” En plus ! “Le contractuel doit se rendre dans l’établissement indiqué par le service gestionnaire du rectorat. Certaines académies font formuler des voeux qui sont rarement respectés. Il peut exister des académies qui laissent les contractuels choisir leur lieu d’affectation mais elles sont peu nombreuses et concernent des disciplines très déficitaires. Le contractuel en fin de contrat doit batailler pour obtenir l’attestation employeur qui lui permettra de s’inscrire à Pôle emploi, certains abandonnent tellement c’est long. C’est quasiment une constante, quelle que soit l’académie.” Cela dépend totalement du service académique, c’est la loterie. Or un retard conséquent dans la réception de ce document provoque des problèmes avec PE. “Personne ne te prévient que le premier salaire est versé avec des mois de retard. Les rectorats te conseillent de contracter un prêt si tu ne peux pas faire autrement ou de solliciter l’établissement qui aurait une enveloppe, souvent ça fait marrer les chefs. Le contractuel est censé construire ses cours sans ressources (pas de manuel, pas d’audio, rien).” Un(e) contractuel(e) a des droits disciplinaires, il faut les faire respecter en demandant cette documentation. “Le contractuel est souvent prévenu de son affectation une fois la rentrée passée. Le contractuel n’est pas formé, mis à part des sessions de 3 jours tous les 3 ans environ, au cours desquelles on te refourgue un millier de liens en ligne et où, irrémédiablement, tu bosses en groupe pour construire un chapitre.” Cette histoire de formation est à double tranchant : si, à priori, elle serait, si elle existait, positive, ne pas en avoir SI ON A une formation disciplinaire ne fait quasiment aucune différence avec les titulaires ayant eu le concours. “L’hostilité des collègues titulaires est de plus en plus flagrante et parfois se manifeste ouvertement (surtout depuis que les médias relaient la com du MEN (job dating et autre…, il n’y a pas de job dating, le recours aux contractuels a toujours existé et si on ne fait rien, cela risque de devenir la norme…)” Là, évidemment, c’est une affaire d’individualités : des professeurs, indifférents, ou, pire, agressifs, méprisants, ou pire, il y en a, il y en a peu, mais ce peu là est déjà en trop, c’est certain. “Certains titulaires se comportent en chefaillon, dénigrent, on a eu le cas d’une collègue contractuelle qui s’est vue interdire par sa collègue titulaire de parler la langue natale des parents non francophones et qui voulait imposer l’anglais lors des échanges auxquels elle assistait… Les camarades contractuels extra-européens ont de très gros problèmes pour obtenir les documents nécessaires à l’autorisation de travailler, c’est un stress quotidien pour eux. La contractuelle va se sentir obligée de cacher sa grossesse pour ne pas déplaire, ce qui génère un grand stress parmi nos camarades, certaines vont jusqu’à modifier leur date de congé maternité afin qu’elles coïncident avec une rentrée par exemple… Les contractuels n’ont pas d’ISSR, même s’ils sont affectés sur plusieurs établissements. Les contractuels n’ont pas droit au congé longue maladie (ils ont droit à un congé grave maladie cependant, il est moins avantageux). Le contractuel enseignant est très peu représenté au niveau des syndicats…il est lui même très peu souvent syndiqué du fait de son manque de visibilité professionnelle et de sa précarité. Pourquoi s’engager au sein d’un syndicat si tu ne sais pas si tu seras encore là dans 2 mois ?” Sur ce sujet, important, pourquoi est-ce que les contractuels n’ont pas exigé qu’au sein de telle ou telle OS, ils gèrent un syndicat spécifique ? Sinon, pourquoi ne pas le créer ? “On le présente souvent comme docile alors qu’il est précaire… Du point du vue d’une majorité de titulaires ou majorité qui s’exprime sur les réseaux: On tolère que les contractuels subissent des conditions de travail plus que dégradées parce que -au mieux- on l’imagine passer et réussir un concours un jour ou l’autre, ce à quoi son contrat le ne contraint pas, et quand bien même, dans l’intervalle, aucun travailleur ne devrait avoir à subir ces conditions., au pire, on le considère comme une anomalie, voire un traître, un complice de la casse du service public, quelqu’un qui restera si peu de temps qu’il peut bien supporter d’être maltraité par un employeur peu scrupuleux.” En effet, on peut lire sur certaines pages des propos lamentables, scandaleux. “Vis ma vie de non-titulaire” et tu verras, pourrait être une réponse à ces collègues pas du tout fraternels. Beaucoup oublient que si nombre de professeurs sont contractuels et pas titulaires, c’est parce que l’Etat a limité les recrutements, les places de concours, ainsi que les moyens d’accès au statut de la FP, et ce alors que certains sont plus diplômés que des titulaires. “Tout cela, j’en oublié, c’est certain, a déjà fait l’objet d’un livre noir des contractuels https://www.lemonde.fr/education/article/2011/11/25/le-grand-malaise-des-precaires-de-l-education_1609283_1473685.html c’était en 2011, plus de 12 ans”. Il y aurait bien besoin de renouveler le document. “Les contractuels sont majoritairement des femmes. Certaines sont donc contraintes de faire avec une charge mentale qu’on imagine très lourde, pendant des années. La précarité use et fragilise, nos vies et celles de nos familles. Soutien également à nos collègues AESH ! aux AED ! et aux agents techniques. Soutien aussi à celles et ceux qui souffrent du travail ou de son manque, aux chômeurs, aux précaires, dans et hors EN. ” Tu as raison, l’important est d’être solidaire et pas solitaire !
SB