Palestine/Israël : une révolution anthropologique exige une pensée totale, sensée, justifiée, et un de nos problèmes fondamentaux réside dans notre rapport à l’homicide

Faire partie de l’aventure humaine n’est pas de tout repos. Si, pour nos premiers aïeuls, il y a des millénaires, le seul enjeu de la survie de l’espèce, dans les vastes étendues de possibilités pas encore expérimentées et exploitées, imposait de s’en tenir à un programme essentiel, réduit, sans moult questionnements, le devenir humain, planétaire, est si complexe, déterminé par tant de forces et de facteurs, qu’il est toujours plus important de se situer – si nous ne voulons pas être « tués », par les conséquences de nos mauvais choix. Où en sommes-nous, de notre devenir humain ?, la question est constante et systématiquement déterminante. Or, entre nos lointains débuts, modestes, avec une espèce réduite à peu, et qui, dans son environnement, paraissait si faible que le mythe de Prométhée et d’Epiméthée en a donné une interprétation brillante, absolument justifiée, sensée, et notre situation d’espèce « dominante », dans une domination dont la plus grande part paraît inintelligente, puisque néfaste, tant pour notre environnement vital et matériel, que pour nous-mêmes, l’humain est devenu le synonyme de la menace vitale, à la fois capable de faire disparaître un virus qui pendant des siècles a provoqué des hécatombes (la variole), et ce en conséquence de notre voisinage avec des espèces animales domestiquées, mais aussi capable de faire disparaître des espèces, par une extermination, jusqu’au dernier, Dodo, comme d’autres. Et chaque année, pour l’alimentation humaine, ce sont des milliards d’animaux qui sont sacrifiés : pour ces dévorés, exploités de leur vivant comme dans leur mort, jusqu’à leurs peaux, leurs os, ce que la fameuse série américaine « V » narrait en séparant des gentils humains d’avec des extra-terrestres reptiliens, n’aura été que la transposition, la traduction, d’une conscience qui se refuse à être pleinement consciente de ce qu’elle est et de ce qu’elle fait, par l’imagination de ce distinguo.

Avec cette « humanité », de tueurs, notre Histoire aura été aussi construite sur l’homicide, notamment à l’occasion de guerres, de conflits armés. Et nous le savons aussi, loin d’avoir suivi une histoire de « progrès », les époques les plus récentes ont vu des hécatombes parmi les impressionnantes, par millions. Il n’y a pas si longtemps, dans une aire dont tant se disaient appartenir à l’une des civilisations les plus développées, l’Europe, il y eut de tels crimes, de ceux que ces fameux « civilisés » attribuaient aux « barbares ». Si l’homicide a pris de telles proportions dans l’Histoire, au point que des périodes sont même conçues pour en cibler une montée en puissance, puis un arrêt, comme avec la « seconde guerre mondiale », si les régimes politiques institués font référence à de telles périodes par des commémorations et des « devoirs de mémoire », comme à celles qui les ont suivies, pour faire l’éloge de la « paix », s’il n’est pas possible, sauf pour un Sade, de faire aussi l’éloge de l’homicide, c’est que nous savons que dès lors qu’il y a des violences criminelles de masse, elles sont susceptibles de mettre en danger l’ensemble des communautés, voire de l’Humanité elle-même, comme un Titanic qui coulerait, sans survivants. La violence interhumaine ne met pas en jeu que des individus, mais des groupes, en raison de son caractère mimétique, de la volonté, nécessité, de venger, qui, en « logique » de vendetta, ne connaît de fin qu’avec le seul survivant de ce massacre. Mais à quoi bon survivre dans un monde où tant, quasiment toutes et tous, ont disparu ? S’il existe peu de films à la hauteur des enjeux humains, pédagogiques, « La route », de John Hillcoat, devrait être vu par le plus grand nombre, afin de faire comprendre que si on passe un seuil quantitatif dans la disparition des humains qui, les uns les autres, s’apportent tant, il ne reste plus que l’absence de tout avenir, d’espoir, une agonie qui elle aussi aurait sa durée, jusqu’à un terme définitif.

Mais, hélas, l’humanisation qui fait notre monde est entourée de tant de choses, produites, que la majorité civile qui forme le monde tient pour acquise, l’humain, comme faisant partie des meubles terrestres, là pour l’éternité. Tel un dieu mortel, la perspective de sa disparition incite cet humain à en balayer la perspective par un rire. Mais les vrais Dieux sont immortels, et nous, nous ne le sommes pas. La disparition de l’espèce humaine est universellement « pensée » à la fois comme absolument horrible ET impossible (ce qui est donc absolument illogique), mais la disparition de tant d’êtres humains, prématurée, par une violence criminelle, ne soulève pas le coeur et l’estomac de la majorité qui, raisonnablement, juge négativement de telles morts, mais pas au point de se lever pour s’opposer à. Et c’est ce que les deux premières explosions nucléaires sur des êtres humains ont démontré : il y a une soumission de masse, à la mort de masse, puisqu’il n’y a pas eu, sur la planète, une protestation claire et ferme contre ces actes génocidaires, la même réalité que par les camps d’extermination, en quelques secondes. Qu’il ait fallu attendre la fin de cette fameuse guerre pour qu’un intellectuel français proclame que « Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles », comme si ce savoir, cette perception, n’avaient pas existé antérieurement, ce qui, pour partie, était, incroyablement vrai, et généralise « nous autres », alors que la nouvelle menace mortelle apparue à la fin de cette guerre visait dans son principe tout être humain sur terre, une responsabilité, faute, qui incombait aux pays, Etats, occidentaux, en dit long sur le très haut niveau d’inconscience de tant de consciences (1). Or, si nous savons que nous devons nécessairement mourir, faut-il qu’il en aille aussi de notre espèce ? Des enfants à venir de nos enfants ? Que penserions-nous si nous étions nés, si nous avions grandi dans un monde où nous aurions fait partie des rares survivants d’un cataclysme causé par les générations antérieures, obligés de travailler à survivre dans les pires conditions, et sans garantie de succès ? Est-ce que nous ne maudirions pas ces générations qui avaient bénéficié de conditions d’existence tellement luxueuses qu’elles en avaient tout oublié, y compris leur conscience, ses devoirs ? Ce sont des questions que nos grands-parents auraient dû se poser, alors qu’ils sortaient vivants des massacres et des tragédies de la fameuse « seconde guerre mondiale ». Mais en fait, il y a tant de questions qu’ils n’ont pas voulu ou su se poser. Et ils n’ont pas été aidés par tant d’intellectuels dont on nous dit pourtant qu’ils furent brillants (2). Pourtant, qu’il nous soit permis de penser et de dire qu’ils n’ont pas épuisé le sujet, qu’ils ne se sont pas posés toutes les questions possibles, importantes, et notamment celle, pourtant logique : comment nous assurer que les générations à venir ne retombent pas dans de telles folies ?

Il faut bien le constater : le rapport humain à l’homicide est ambigüe. Si l’interdit du meurtre est universel, s’il est même lié à l’apparition de « révélations » fondatrices de croyances « religieuses », si les droits positifs l’évaluent négativement et le sanctionnent diversement, l’homicide fait partie des sujets préférés des humains, dans la littérature, le cinéma, qui est le prolongement de la littérature et des mythologies, la presse. Une oeuvre artistique, une connaissance scientifique, peuvent être « superbement » ignorées par les quotidiens, mais un crime aura toujours le droit à quelques lignes ou plus. Pour quelques uns, que nous ne pouvons que juger, malades, tuer garantit même un accès direct à la célébrité, relative, absolue – sans que nos communautés respectives ne se soient pas posées la question de la suppression des mentions identitaires pour les criminels, comme les Anciens le firent pour celui qui se rendit responsable de l’incendie qui a détruit la bibliothèque d’Alexandrie. Si nommer attribue personnellement une responsabilité, il fait ressortir le coupable de l’anonymat dans lequel il se situait auparavant, pour la plupart de celles et ceux qui se rendent fautifs de, et il est bien connu que pour des individus identifiés par leur passion pour un type de crimes, nombre de ces auteurs ont aussi fait cela pour devenir, un jour, connus de tous (3). Mais plutôt que de les tuer, ce qui revient à leur faire ce que nous leur reprochons, ce qui nous place dans la même situation qu’eux, plutôt que de les congeler, tétaniser, comme dans la célèbre fiction de Philip K.Dick « Minority Report », pourquoi ne pas leur garantir de disparaître de l’Histoire humaine ? A la différence de ce qu’ils ont fait, il s’agirait alors de ne pas s’en prendre à leur existence, mais à leur connaissance/reconnaissance sociale. Evidemment, les modalités d’une telle logique devraient être finement réfléchies et mises en oeuvre, et devraient être reliées à un pouvoir politique exemplaire, alors que nous en sommes à des années-lumière. En attendant, hélas, (…) (un Allemand) a sévi dans l’Histoire (par le soutien de millions d’Allemands et d’Européens) et continue de sévir dans la mémoire collective – pour ne citer que lui. Il est même un des humains les plus célèbres. Il est frappant de constater que si tant considèrent, avec raison, qu’il aura été un des pires humains de l’Histoire, dont l’influence aura été principalement tragique, puisqu’il fut le chef de hordes de tueurs, peu sont tout aussi choqués par sa présence dans notre mémoire collective universelle, dans nos dialogues alors que, sur ce sujet comme sur tant d’autres, il n’y a nulle fatalité, mais des choix. Un récit sur la seconde guerre mondiale pourrait nommer que le nazisme, sans nommer les principaux chefs nazis. Il ne s’agit pas de les oublier, ce qui est impossible, mais de cesser de les placer sur un piédestal historique, ce qui est le prolongement du piédestal politique qu’ils avaient organisé pour eux-mêmes. Et ce parce qu’il est d’autant plus terrible pour l’Histoire ET l’Histoire européenne qu’un individu aussi médiocre, et pire encore, mauvais, soit devenu un de ses “représentants” permanents.

On nous pardonnera, ou pas, cette longue introduction à notre sujet explicite, la situation faite à « la bande de Gaza », à ces deux millions d’habitants, mais il fallait d’abord exprimer un certain nombre de principes et de réflexions anthropologiques, avant de parler de ce qui nous saisit, sidère, effraye, dans ce que nous apprenons des évènements en Palestine et en Israël. Ce propos introductif aura permis de faire clairement comprendre que, NOUS, nous ne nous réjouissons pas de la mort de tant d’êtres humains (même si, chaque jour, nous sommes incités à cette appréciation, et les crimes commis par certains sont tels que dès lors que nous apprenons leur propre mort, nous en ressentons un soulagement, que nous devons nous reprocher), avec ces civils assassinés le 7 octobre, les civils assassinés depuis le 7 octobre. Nous devons nécessairement distinguer entre les civils et les hommes armés : soldats, militaires, combattants, ceux-ci sont des humains qui font le choix de pouvoir donner la mort à d’autres êtres humains, or, nous l’avons rappelé, quel que soit le contexte, l’interdit du meurtre vaut toujours. Mais est-il parfois inévitable de s’en remettre à une telle solution, définitive, par exemple, face à des humains comme enragés ? La mort donnée neutralise une force physique par une force physique : l’essentiel est donc cette opération, la « neutralisation ». Mais si certains humains tuent, pour aller au-delà de la neutralisation, pour détruire, faire disparaître, une existence, des existences, faut-il faire de même avec eux ou se contenter de les neutraliser et de les contrôler ? Hélas, depuis un peu plus de vingt ans au moins, nous sommes sommés d’assister, d’accepter d’assister à une reprise de grande ampleur de la volonté criminelle, avec le 11 septembre 2001, l’invasion de l’Afghanistan par les Etats-Unis, l’invasion de l’Irak par les mêmes Etats-Unis, l’apparition de Daesh, la destruction de la Libye et de la Syrie, la guerre au Yemen, la guerre en Ukraine et maintenant le siège actuel de Gaza, après les évènements du 7 octobre. Depuis le 7 octobre, le gouvernement israélien dit clairement, sa volonté de vengeance, tient des propos racistes, voire de logique génocidaire, contre les Palestiniens, prétend user d’une armée « la plus morale du monde » sans mettre de frein à ses pratiques d’assassinats, et ce parce que ce gouvernement n’a jamais énoncé une question, n’a pas travaillé sur cette question : comment neutraliser ce qui nous menace, et seulement ce qui nous menace ? Comment distinguer entre des civils, embarqués malgré eux dans cette tempête, et des combattants qui réellement nous ciblent ? Il faut le constater : pour ce gouvernement, il y a une décision, implicite, gravissime, qui consiste à NE PAS distinguer entre les civils et les combattants. Le nombre d’enfants tués par des bombardements et autres actions militaires en constitue une preuve, tragique. Ce que le gouvernement d’Israël pratique sur et contre Gaza, ce sont des bombardements, de grande puissance, au motif qu’ils visent des combattants du Hamas, et s’il y a des civils à proximité, alors, c’est ainsi, « tant pis, ce n’est pas de notre « faute » ». La déculpabilisation du responsable est, on le sait, l’une des choses les plus importantes et dangereuses, avec ces gens, d’armes. Les dirigeants israéliens, ses soutiens, disent, diront : mais alors, comment faire ? Diverses autres options existaient, existent : une prime globale pour la remise des responsables du Hamas, qui ont accompli les actes du 7 octobre; se contenter du blocus (une vieille pratique humaine) total de la ville. La principale option existait, existe encore : négocier avec les dirigeants palestiniens, par exemple, en proposant la remise des responsables du 7 octobre contre des prisonniers palestiniens, et négocier aussi sur tous les autres sujets qui font de cette région une zone de malheurs intenses pour les uns et de bonheurs intenses pour les autres (4). Les dirigeants israéliens prétendent qu’ils doivent suivre le TINA de l’auto-défense : il existait, existe, des alternatives, qu’ils se sont refusés à étudier, envisager, qu’ils n’ont même pas pensé, et ce par adhésion à la pure brutalité, typique de quelques personnages de célèbres films où les morts s’entassent, minute par minute. Et c’est ce qui a eu lieu, ce qui a lieu, à Gaza. En choisissant une autre option, réfléchie, stratégique, modérée, les dirigeants israéliens auraient démontré leur sens moral, et leur intelligence. A la place, il y a seulement des massacres, des civils, morts par absence de soin, désormais, par défaut d’alimentation, d’eau potable, et avec des risques épidémiques qui augmentent chaque jour.

Or Israël n’est pas innocent, des conditions historiques qui ont rendu possible le 7 octobre : il n’existe de « combattants du Hamas » que parce qu’Israël a fait de Gaza une « prison à ciel ouvert », a favorisé le Hamas, a assassiné des milliers de Palestiniens depuis des décennies. Et c’est même le droit international qui est sévère avec Israël : autant les Palestiniens ont le droit de se défendre, autant Israël, puissance OCCUPANTE, n’en a pas le droit. Oui, les civils israéliens assassinés le 7 octobre ne méritaient pas de disparaître de cette planète ainsi, mais ces civils n’étaient pas Israël, Israël ne se confond pas avec ces civils, puisque c’est un Etat de militaires qui, depuis des décennies, fait la guerre, aux Palestiniens, aux peuples et aux Etats arabes à proximité. Les dirigeants israéliens peuvent prendre le sujet par n’importe quel biais, ils ne peuvent sortir de ce problème : avant 1948, Israël n’existait pas, puisque n’existait que la Palestine. Des milliers d’étrangers sont arrivés et ont déclaré : désormais, c’est chez nous. Mais si demain, des étrangers font de même envers les Israéliens ? Pour résoudre nos problèmes, il faut toujours en revenir à ce principe des principes humains : voudrions-nous que les autres nous fassent ce que nous pensons, voulons leur faire, ce que nous leur faisons ?

Les voleurs volés par des voleurs – seront-ils eux aussi volés ?

Les voleurs et les criminels sont rarement d’accord pour que les autres les imitent : ils prétendent donc disposer d’un droit, spécial, « exceptionnel », une « destinée manifeste ». Ils sont incapables de démontrer qu’ils disposent d’un tel « droit », laisser-faire-passer. Que des voleurs invoquent un droit de propriété, divin, est une chose : qu’ils démontrent l’existence de ce droit de propriété, la preuve qu’il est « divin », en est une autre, et, cela, nul ne l’a jamais vu. Et quand ces voleurs et criminels pensent et agissent en « propriétaires », nous nous trouvons à l’acmé de l’inversion des faits (5) – et c’est ce qui fait le lien entre la situation faite aux Palestiniens et celle de la majorité civique, des pauvres, en France : dans leur propre pays, ils sont traités comme des « étrangers », et, comme la loi récente dite sur « l’immigration » en constitue la démonstration, de tels étrangers, pauvres, sont, seront, seraient, si nous laissons faire, explicitement maltraités, au point d’être massivement expulsés. Nous nous trouvons toutes et tous en territoires occupées. Nous sommes des territoires occupés. Et c’est pourquoi les voleurs et les criminels sont si friands de fictions : il était une fois une histoire « incroyable ». En effet. L’Histoire humaine a le grand avantage de ne pas être une fiction, même si les fictions l’ont tant influencé. Mais nous ne pouvons pas confondre un homicide humain avec sa prétendue justification par le criminel, selon lequel une « voix » lui a dit que… A propos de « voix », nous aimerions que de plus en plus, tant préfèrent écouter la «  voix/voie de la raison », plutôt que de telles fictions. Et pour cela, le dialogue interhumain est notre plus grande force. Alors que la nouvelle année de cette ère-là commence (il y en a d’autres), c’est ce que nous souhaitons aux uns et aux autres, en sachant que, pour qu’il y ait de tels dialogues, il n’est pas question de velléités, mais de volontés. Là où le monde parle, les dirigeants israéliens, hélas soutenus radicalement par les dirigeants américains, monologuent. Le refus de parler avec des interlocuteurs nécessaires et autres que soi, est, du point de vue de l’Histoire humaine, une négation de ce qui fonde notre Humanité : LA violence commence, déjà, là. De tels dirigeants se récusent eux-mêmes – mais, hélas, s’accrochent à la tête de tels Etats, machines à légitimer des forces politiques illégitimes, puisqu’elles sont l’apologie de la violence interhumaine, au sein de leur propre communauté comme avec les autres communautés. L’ONU, par le sens de son existence, devrait disposer d’un cercle de la négociation permanente, et cela vaut aussi pour l’Ukraine, ce qui se passe actuellement en Afrique, au Congo, et dans quelques autres régions du monde. Evidemment, l’ONU n’est pas responsable des limites de son action, si tel ou tel pays refuse le dialogue. Mais si un tel cercle était institué, filmé en toute transparence pour les citoyens du monde, et qu’il y ait autour de la table une partie, et que l’autre partie attendue refuse de venir s’asseoir et parler, le monde entier constaterait cette mauvaise volonté. Et, on le sait, finalement, la partie concernée viendrait. Il ne faut donc pas se résoudre à la moindre impuissance, une contradiction dans les termes dès lors que nous parlons d’existence humaine : s’il y a des limites objectives à nos « puissances », et pour certaines, fort heureusement, ces puissances existent, et nous faisons nécessairement des choses. Actuellement, ce qui domine va plus tôt dans le mauvais sens, sous l’influence de tant qui ont des intérêts financiers à de telles orientations, mais ils ne dominent ces enjeux que parce que nous refusons d’affronter ces individus, ces forces, ces groupes, cyniques. Si le monde est plutôt en paix qu’en guerre, nous le devons à la sagesse des peuples, mais des forces sont à l’oeuvre, dont le projet commun est de susciter une guerre civile humaine, planétaire. Devons-nous rester les bras croisés ? Ni les ZAD familiales ni les ZAD communautaires ne nous sauveront : puisque, au dehors, des nihilistes rêvent d’un grand soir tragique. Criminels en puissance, criminels déjà accomplis, ils savent qu’ils peuvent compter sur des fabricants-marchands, pour qui la fin, financière, justifie les moyens, la fabrication de ces puissances mortelles. A ces Marchands de mort, ou coupables de crimes, nous ne devons pas leur faciliter la vie, et c’est un euphémisme. Il est plus que temps de défendre, mondialement, les droits civiques, contre les attaques des Puissances, étatiques, financières, des nihilistes (« terroristes »), et ce dans la fraternité la plus authentique et inclusive. Nous sommes la majorité. Les civils Palestiniens font partie de notre majorité. Les civils israéliens, qui ne sont pas des colons, qui s’opposent aux colons, qui ne soutiennent pas le gouvernement israélien, font aussi partie de notre majorité. Nous sommes l’Internationale, du genre humain, et si ce que nous vivons est la « lutte finale », c’est qu’il n’y a que deux sorties à ce qui se passe : la mort pour toutes et tous (6) (mais qui a le droit (7) d’imposer un tel cours de l’Histoire à la majorité et à tant d’innocent(e)s, d’enfants qui ont un droit absolu à vivre ?), ou la vie pour toutes et tous, dans la fraternité. Et pour cela, nous devons intensément, penser, nous parler. Si nous nous trouvons toutes et tous en territoires occupées, si nous sommes des territoires occupés, de quoi et comment nous libérer, décoloniser ? Sauf erreur, le chemin commence avec les armes, la menace des armes, l’usage des armes, la violence induite, la violence représentée, la violence appréciée, valorisée. Et ce que sont et font les Etats-Unis est sur notre chemin.

1) D’une manière curieuse, dans le programme de l’enseignement de Philosophie en France, la notion générale de « violence » brille par son… absence. Pourquoi ? Nous laissons cette question à la réflexion de chacune, chacun. 

(2) le fameux texte de Camus sur la « révélation de l’arme atomique » est « lumineux », parce qu’il est dramatiquement superficiel. Il universalise la faute, alors qu’elle relève seulement des Occidentaux, dont il ne parvient pas à nommer le pays responsable et coupable des deux premières utilisations, génocidaires, de ces armes, les Etats-Unis. 

(3) mais faut-il citer ici tel ou tel de ces « sérial killers » ? Pour ne pas nous contredire, non. Hélas, ils font l’objet d’une publicité universel, très troublante.

(4) il ne s’agit pas de dire que nous défendons un choix de l’une ou l’autre de ces options, mais en constatant qu’elles existaient, existent, démontrer que la « réponse » du gouvernement israélien aux évènements du 7 octobre ne relevait pas d’une nécessité. Un choix a été fait : il induit une… responsabilité. Il n’est pas possible de tuer des civils pour venger des civils : c’est ce que Al Qaeda et Daesh ont fait, selon leurs discours (« nous vengeons… »). Et en tenant un discours banalement et tragiquement manichéen, B. Netanyahou a avoué qu’il pense comme les dirigeants de ses organisations. 

(5) C’est ce que Platon décrit, dans le livre VIII de « La République », concernant la tyrannie. Actuellement, nous en avons des démonstrations quotidiennes en Palestine/Israël, tant de la part des dirigeants gouvernementaux, des militaires, que des citoyens eux-mêmes, avec les colons, capables de s’en prendre à des individus, familles, pour les dépouiller, jusqu’à les tuer, mais aussi de s’en prendre aux tombes des aïeuls des Palestiniens. 

(6) la mort pour toutes et tous, puisqu’une spirale infernale de bombardements nucléaires, de tel contre tel ou tel autre, mobiliserait tellement de têtes nucléaires que la vie sur Terre en deviendrait impossible, et que les survivants seraient condamnés à disparaître les uns après les autres. 

(7) le problème, le danger, l’Histoire nous l’enseigne, c’est que des individus, même en petit nombre, osent affirmer qu’ils disposent de droits spécifiques, spéciaux, qui les autorisent à accomplir ce qui est interdit à chacune, chacun. C’est la réponse du « président des Etats-Unis », interprété par Martin Sheen, à ses interlocuteurs, dans le film « Dead Zone », transposition du livre du même titre, de Stephen King. Les dirigeants américains osent envisager de nouvelles frappes nucléaires, et le candidat Donald Trump apparaît, de ce point de vue, extrêmement dangereux, au point qu’il fut même dénoncé comme tel par un haut gradé de l’état-major américain. Or, il est à nouveau candidat, et les sondages actuels le donnent vainqueur des primaires républicaines, malgré ou grâce à ses ennuis judiciaires multiples et conséquents.

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