“Racisme systémique” : avec Benjamin Straehli, les glissements de la critique explicite à la négation implicite, par le jeu de la division “républicaine” entre “racisés”…

Le texte ci-dessous propose la lecture et l’interprétation d’un texte, lequel constitue la même opération, sur un texte publié par le professeur de sociologie et chercheur Eric Fassin. Ce texte ci-dessous n’est pas une prise de parole, à la place d’Eric Fassin, lequel est, évidemment, assez grand, outillé, pour répondre lui-même. Il n’a pas sollicité la rédaction de ce texte, n’a eu aucune part dans sa rédaction, et sa publication est effectuée sans qu’il ait préalablement pris connaissance du texte, sans son aval. Il prend acte de la publication de ce texte polémique, afin d’en proposer une réponse, évidemment singulière. Etant donné le sujet, le racisme (systémique), ses implications, il est apparu qu’une contribution sur ce sujet se justifiait, en raison des problèmes sociaux et politiques dominants, particulièrement français. 

Dans un texte publié il y a peu, sous le titre, « Le « racisme systémique » selon Éric Fassin », partagé sur le blog de Mme Catherine Kintzler, Benjamin Straehli, professeur de philosophie, a conclu qu’« il serait hasardeux d’en tirer des conclusions générales sur la notion de racisme systémique, qui ne peut être tenue pour responsable de tout ce que l’on écrit sur elle. La question qui a servi de point de départ à mon examen était de savoir si la confusion que semble véhiculer cette notion, et qui est relevée par Matt Lutz, provient uniquement d’une incompréhension de la part du grand public. Une lecture critique de l’article d’Éric Fassin suggère une autre hypothèse : le mal pourrait venir de la façon même dont les promoteurs les plus experts de la notion en font la publicité. Cette hypothèse ne pourrait être confirmée que par l’examen d’un grand nombre d’autres textes ; je ne peux conclure ici qu’à l’inconsistance de celui que j’ai critiqué. ». S’il serait hasardeux d’en tirer des conclusions générales sur la notion, l’auteur commence pourtant son propos en considérant d’emblée que, « Dans un article publié en 2022, Matt Lutz met en question de façon pertinente la notion de « racisme systémique » ». (1) Pourtant, les deux auteurs semblent se contredire puisque Benjamin Straehli ajoute : « D’un côté, reconnaît-il, le phénomène que cette expression est censée désigner existe bel et bien : dans les sociétés occidentales, les personnes non blanches sont surreprésentées parmi les chômeurs, les prisonniers, les pauvres… Il y a donc bien un ensemble d’inégalités sociales corrélées à l’origine ethnique ou à la couleur de peau. » Mais l’autre côté n’est pas un complément de cette considération, puisque Straehli ajoute, « (Lutz dénonce) le vocable est trompeur, car il donne l’impression illusoire que l’on a expliqué le phénomène, quand on lui a simplement donné un nom ». Mais l’expression avec sa définition se réduit-elle à affirmer que les personnes non blanches sont discriminées par les forces des systèmes politiques occidentaux ? Est-ce qu’un mot, une expression, se confondent avec une explication du phénomène ? S’il y a affirmation d’un phénomène, l’explication se trouve à côté, relié à un mot, une expression. Il est vertigineux de lire de telles confusions, de la part d’intellectuels. Et il en va de même de la référence fait au Molière du Malade imaginaire,  dont on se demande bien ce qu’il vient faire dans cette galère, alors qu’il s’agirait de mettre en cause une « plate tautologie » : tout racisme serait systémique, le fait de le préciser serait donc non nécessaire et sans apport. Ce serait oublier que le mot est utilisé dans des usages publics dont les cadres entendent ignorer ou évacuer ou nier , explicitement et surtout implicitement, ce caractère, systémique, et que le dire change les choses. Le racisme n’est plus, dès lors, seulement « les théories affirmant l’existence et l’inégalité de races humaines, ainsi que des comportements punissables selon la loi » ou la cause/effet d’un « ensemble d’inégalités sociales, indépendantes des intentions des membres de la société ; le mot évoque inévitablement une intention malveillante de défendre une prétendue supériorité blanche », mais l’articulation entre ces pratiques et ces théories, et ce aujourd’hui encore, bien que, officiellement, les pays occidentaux aient, avec la fin de la seconde guerre mondiale, fini avec le racisme, en l’espèce, le racisme d’Etat le plus explicite et le plus violent, et le racisme est, en France, omniprésent – est-ce bien la peine de le démontrer ? Et, hélas, bien que Eric Fassin, et d’autres, aient pour propos, en partie, d’énoncer des évidences qui ne nécessitent aucune formation intellectuelle particulière ou de haut niveau, ces évidences sont contestées, comme si aujourd’hui, nous acceptions de voir des néo-nazis contester l’existence du racisme nazi. Oh mais wait !, nous commençons à voir, entendre cela… Mais selon Benjamin Straehli, le propos de Matt Lutz entend affirmer lui aussi que si « Un tel procédé » (celui assigné à Eric Fassin et d’autres) « détourne les esprits d’une véritable recherche des mécanismes qui produisent ou entretiennent le phénomène ainsi nommé, tout autant que d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre », le phénomène ainsi nommé existe donc bel et bien puisqu’il lui manque seulement « une véritable recherche des mécanismes qui produisent ou entretiennent le phénomène ainsi nommé, tout autant que d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre. ». Le conflit concernerait seulement l’identification de la « véritable recherche des mécanismes » comme sur la méthode « d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre. ». Dès le début du texte, le coeur de la conclusion serait déjà annoncé : « le mal pourrait venir de la façon même dont les promoteurs les plus experts de la notion en font la publicité ». Et alors que le lecteur attend que l’auteur commence enfin son propos, voilà qu’il faut subir une nouvelle répétition : « Néanmoins, pourrait-on se demander, ne s’agirait-il pas là, tout simplement, d’un échec du grand public à saisir le sens exact d’une notion, ou même d’une confusion entretenue à dessein par les adversaires de cette dernière, pour la discréditer ? L’objet du présent article est de montrer que la confusion conceptuelle peut bien venir, au contraire, de défenseurs de la notion, et non des plus ignares ». Ceci étant dit au cas où nous n’aurions pas compris. Après avoir concédé qu’une « vulgarisation militante est une démarche parfaitement légitime », Straelhi en vient enfin au fait en indiquant que « jusque dans les années 1980, on aurait cru que le racisme était une idéologie partagée par certains individus, puis on se serait rendu compte qu’il était en réalité un ensemble de mécanismes sociaux produisant des discriminations dont sont victimes les personnes « racisées », et ce même si elles ne sont pas confrontées à des partisans de l’idéologie raciste. Une telle présentation des choses a de quoi étonner. C’est un fait qu’il y a des discours affirmant l’existence et l’inégalité de races humaines. C’est aussi un fait que dans la société, les personnes d’une certaine origine ethnique ou d’une certaine couleur de peau peuvent rencontrer plus de difficultés que les autres, même si elles n’ont affaire qu’à des interlocuteurs rejetant l’idéologie raciste. Il y a donc là deux phénomènes, entretenant sans doute entre eux des rapports complexes, mais pouvant probablement exister indépendamment l’un de l’autre. Le bon sens suggérerait de donner un nom distinct à chacun des deux. » Mais est-ce que le terme de « racisme systémique » entend interdire de nommer aussi, autrement, … théorie & praxis ? ! Est-ce qu’une expression synthétique vient faire disparaître des… distinctions, de champs, de niveaux ? Est-ce qu’Eric Fassin fait cela ? Incite à cela ? Participe de cela ?

L’auteur en vient enfin au fait du fait : « son but est de contester que Linda Kebbab soit victime de racisme quand Taha Bouhafs la traite d’« Arabe de service » ; il n’y a donc pas deux théories concurrentes de la même chose, mais une controverse quant au choix de ce qu’on appellera d’un certain nom. Un esprit soupçonneux pourrait se demander si, en tentant de faire passer cela pour une révolution scientifique, Éric Fassin ne cherche pas tout bonnement à masquer le véritable but de la manœuvre : pouvoir décider arbitrairement à qui on va infliger ou épargner le qualificatif infamant de « raciste » ». Propos tenu à l’occasion de cette vulgarisation militante : « J’entends le faire en prenant pour exemple un article d’Éric Fassin, « Les coupables, ce sont les victimes », publié d’abord sur le site de l’Obs, le 9 avril 2021, puis republié sur son blog le 9 juin 2021 sous le titre « Qu’est-ce que le racisme ? La définition en procès » ». En lieu et place d’une « révolution scientifique », nous aurions, grâce à un esprit soupçonneux qui ressemble beaucoup à l’auteur de ce texte, une entreprise visant « à masquer le véritable but de la manœuvre : pouvoir décider arbitrairement à qui on va infliger ou épargner le qualificatif infamant de « raciste » ». Mais pourquoi, diantre, une telle polémique ? Quelle est donc cette histoire, de cette Linda Kebbab, qualifié par Taha Bouhafs, comme « Arabe de service » ? « Cette insulte faisait suite à une déclaration de cette porte-parole du syndicat policier Unité SGP FO, contestant que les circonstances de la mort d’Adama Traoré soient comparables à celles de la mort de George Floyd. Taha Bouhafs insinuait ainsi que Linda Kebbab n’aurait été qu’une marionnette aux mains d’un pouvoir blanc, mise sur le devant de la scène pour dissimuler le racisme de la police. ». Taha Bouhafs, jeune français, ayant aussi des origines arabes, a-t-il formulé une insulte en qualifiant une femme française ayant un profil semblable au sien, d’… Arabe ? Il aurait donc insulté une part de ses origines. Ou bien, a-t-il mis en cause une personne pour ce qu’elle faisait, ce « service », opposé au sien, ce qu’il aurait dû dire, Arabe qui n’est pas au service de… ? Hélas, Taha Bouhafs a été condamné, en première instance et en appel, mais a fait appel de cette deuxième condamnation par un pourvoi en cassation. Après la condamnation en appel, Taha Bouhafs a ajouté : « La formule utilisée visait à qualifier une stratégie raciste de l’institution policière et dénoncer la position politique de Linda Kebbab, représentante d’un syndicat de police dont un des porte-parole déclare à la TV que : Dire bamboula à un noir était à peu près convenable ».  L’affaire judiciaire n’est donc pas terminée, et, le serait-elle, par un pourvoi à nouveau défavorable, que la condamnation pour « injure publique à caractère raciste » ne serait pas plus justifiée, sensée, hier qu’aujourd’hui, puisque la partie par laquelle Bouhafs a mis en cause Kebbab tenait dans ce constat qu’elle était « au service », qu’elle se servait de son identité ou que cette identité était utilisée, pour faire de son cas une généralité : la police ne peut pas être une institution raciste puisque j’en suis membre (cf. la vidéo ci-dessus). Comme si, avec les lois sur la discrimination positive aux Etats-Unis, on considérait que, par l’effet d’intégration de ces lois, par exemple, de noirs américains, le racisme aux Etats-Unis n’existait plus, le racisme dans la police n’existait plus, comme si un policier noir qui se serait exprimé pour contredire l’existence d’un racisme structurel dans la police américaine avait invoqué sa propre existence, en accusant des citoyens d’insulte publique à caractère raciste ! Hélas, la France réussit à faire pire que les Etats-Unis, puisqu’il y a, aux Etats-Unis, des policiers condamnés et emprisonnés pour des faits criminels, en lien avec le racisme, des policiers sanctionnés, jusqu’à des licenciements, là où, en France, ces condamnations et sanctions sont rarissimes, alors que les faits ne sont pas aussi rares.

cf. la présentation du travail de “Incarcération”, par une note antérieure sur ce blog

Et, le tribunal, en première instance, en appel, plutôt que de rire à une telle demande de la requérante, lui a donné satisfaction, deux fois. Mais avec ces condamnations, en plus des pratiques policières, il faut donc constater que le racisme systémique est telle que même l’institution judiciaire y contribue, de manière décisive, puisque c’est elle qui prend de telles décisions, de « justice », au nom de la République, de la France. En France, intégrer une force de police n’implique t-il pas, pour des personnes non blanches et en tant que telles, des effets divers ? Si l’auteur le reconnaît, ce serait principalement du fait de telles mises en cause : « On comprend bien que le fait d’avoir à subir ce genre d’insulte constitue, pour une femme arabe, un obstacle à surmonter pour s’engager dans la police et y prendre des responsabilités professionnelles ou syndicales ». Quid des obstacles internes, pour y travailler ? L’auteur prétend ignorer leur existence, comme du fait que, en prenant « des responsabilités professionnelles ou syndicales », la personne contredit une part de ces effets, dont le racisme interne, puisque les policiers en poste savent que, s’ils s’en prennent avec un propos raciste à une des leurs qui a un mandat syndical par exemple, ils prennent des risques. Par contre, des agents, sans une protection officielle ou institutionnelle ont déjà attesté de ce racisme systémique, tant contre eux comme d’autres citoyens, et ont préféré quitter la police, ou ont été incités à la quitter, ou ont été révoqués.

Le même auteur prétend encore ignorer le fait que la situation sociale des « racisés » a des effets déterminants sur ce que les uns et les autres peuvent vivre, subir, et que « la conclusion (…) serait que la syndicaliste est bel et bien, en l’occurrence, victime de racisme » a beau être logique, elle n’est pas réaliste, puisque, bien qu’elle soit « racisée », par le fait d’être reliée à une identité arabe, elle est d’emblée perçue comme une des « nôtres », ce qui implique aussi de sa part de démontrer qu’elle est des leurs, par des actes, expressions, de soutien à ces collègues. Et pour ceux-là, quand ils sont mis en cause pour un propos, un acte, raciste, pouvoir invoquer qu’ils ont une collègue, qui les connaît bien, qu’elle connaît bien, est un avantage, comme lorsque des racistes peuvent dire qu’ils ont « un ami noir », ou un autre encore. Cette intégration dans un corps de fonctionnaire induit un « brainwashing », un « lavage de cerveau », afin que la personne non blanche se sente plus blanche que les blancs. Faire semblant que ces processus n’existent pas relève de la non-méthode, Coué. La mauvaise foi de l’auteur, hélas, finit par se révéler lorsqu’il ajoute que « les insultes dont les policiers arabes peuvent être la cible, de la part d’autres Arabes, en tant que prétendus traîtres à leur ethnie, font manifestement partie des mécanismes sociaux qui peuvent, en dissuadant de s’y engager, contribuer à la sous-représentation des Arabes dans la police, et donc à son « racisme systémique » ». La non-représentativité de ce corps de fonctionnaires s’expliquerait donc par le rejet de ce corps par des personnes racisées ! Le propos échappe de peu à une accusation de « racisme anti police », que l’on hésite à énoncer, tant certains sont, dans ce pays, friands de ce genre de formules scandaleuses. Même si l’auteur ne vient pas objectivement sur ce terrain, il suggère quand même qu’il considère qu’il peut être légitime de parler de « racisme anti blanc », un des dadas de l’extrême droite : «  On comprend alors aisément le parti qu’il croit pouvoir tirer de l’idée de racisme systémique : suivant cette notion, les militants noirs ou arabes qui ont la sympathie d’Éric Fassin ne sauraient être coupables de « racisme anti-Blancs », puisque les Blancs, n’étant pas victimes de discriminations systémiques, ne peuvent pas être victimes de racisme ». En effet : des Blancs peuvent être visés par un propos raciste, « Les blancs… », mais ils ne peuvent jamais faire l’expérience d’un racisme anti blanc, sauf à se trouver dans un pays dominé par des personnes non blanches, et être visés par de tels propos par des personnes non blanches.

Et encore y aurait-il, parfois, de telles expressions racistes envers les Blancs, qu’il s’agirait d’une imitation, affaiblie, du racisme européen envers tant de non-Blancs, racisme dont l’Histoire n’a pas été brève ni superficielle. « (…) pour être raciste un propos ou un acte doit viser tous les membres d’un groupe ethnique, en raison de leur appartenance même à ce groupe, et non en raison d’un comportement particulier de certains d’entre eux » et, pour qu’il y ait racisme, réel, doivent se trouver des « mécanismes sociaux conduisant à la discrimination de certains groupes ethniques ». Ces mécanismes sont les conditions de possibilité du racisme, les propos racistes en sont une expression, comme l’écume, la pointe d’une vague. Où qu’ils soient, les Blancs sont majoritairement dominants, et, s’ils ne le sont pas, ils sont, jusqu’ici, protégés par l’absence de sentiments ET de doctrines racistes de la part des personnes non blanches. Existe-t-il un « Mein Kampf », visant les Blancs ?! Etant donné ce que les Européens ont fait subir aux personnes noires en Afrique, il eut été possible que ceux-ci finissent par imiter leurs anciens maîtres esclavagistes, mais ces populations sont plutôt imperméables à ce produit frelaté, européen – le racisme.

Là où ils ne l’ont pas été, comme au Rwanda, et ce contre d’autres personnes noires, des chercheurs ont démontré que la colonisation belge dans cette région avait été machiavélique et avait fait infecter les consciences avec ce virus, jusqu’à ce que, par d’autres manipulations occidentales, politiques, économiques, le pire devienne là aussi possible. « Dans « Rwanda. Racisme et génocide. L’idéologie hamitique », Jean-Pierre Chrétien, et Marcel Kabamda le disent clairement : « Le génocide des Tutsi n’a pas été improvisé en fonction d’une conjoncture. Il n’était pas non plus une fatalité inscrite dans les gènes de la population rwandaise : ce n’est pas un objet ethnographique. Il est le produit, très moderne, d’une option politique extrémiste, jouant ouvertement du racisme comme arme de contrôle du pouvoir. Les médias qui en ont été les vecteurs efficaces l’attestent sans ambages. Mais cette mise en condition de tout un pays aurait été impossible sans l’inscription durable dans la culture de la région des Grands Lacs d’une idéologie intrinsèquement raciste, discriminant, sous les étiquettes hutu et tutsi, des autochtones et des envahisseurs, une majorité naturelle et une minorité perverse, le « vrai peuple » rwandais et une race de « féodaux ». Le 11 juin 1994, un paysan interrogé près de Gitarama (au centre du pays) expliquait : « On me demanda ma carte d’identité et je leur ai répondu que j’étais hutu et donc un citoyen de plein droit de ce pays ». Cette simple phrase dit tout sur l’ancien régime rwandais »(2). Donc, pour en revenir à l’affaire Bouhafs/Kebbab qui structure le texte de cet auteur, non, le propos de Taha Bouhafs ne ne visait pas « tous les Arabes », ni du tout « les Arabes » puisque, prenant appui sur une Linda Kebbab nécessairement perçue en tant qu’Arabe dans une France du racisme et dans une police déterminée par le même racisme, Taha Bouhafs distinguait entre elle, « de service » et lui, dont les choix professionnels n’ont pas été faciles dans cette France. Preuve en fut, en est, qu’une Linda Kebbab a la parole dans tant de médias, si souvent, en tant que policière, avec ce nom, « Kebbab » et que les vrais racisés, eux, y sont interdits. Ajoutons qu’il en va de même avec les professeurs de Philosophie qui, dès lors qu’ils sont au service, sont invités partout, pour y faire entendre leur soumission (comme avec ce professeur d’Université qui va de plateau en plateau pour affirmer, sans argumenter, que « le réel français est le juste… »), et que les « insoumis », en fait comme en nom, sont eux tout aussi proscrits.

Loin d’être généreux avec le chercheur dont il conteste le travail et les propos, comme il le prétend en indiquant «  Ce que j’appelle ici vulgarisation militante est une démarche parfaitement légitime : si un chercheur estime que certains faits ou notions, dont ses travaux l’amènent à prendre connaissance, justifient certaines prises de position politiques, il est normal qu’il le fasse savoir à un large public, pourvu que sa présentation de l’état des connaissances soit juste. Mon propos n’est donc nullement d’accuser Éric Fassin de confondre recherche et militantisme ; c’est à dessein que je prends pour objet d’étude un texte qui ne prétend pas appartenir à la littérature académique : il s’agit pour moi de mettre en évidence les failles d’un discours adressé au grand public, par quelqu’un dont les titres feraient espérer la meilleure qualité possible dans cet exercice », il s’agit surtout de ne pas avoir à se confronter à la littérature académique en raison des difficultés d’une telle perspective, mais de s’en prendre à ce qu’il pense être un talon d’Achille, cette vulgarisation militante avec ce texte, « Les coupables, ce sont les victimes », publié d’abord sur le site de l’Obs, le 9 avril 2021, puis republié sur son blog le 9 juin 2021 sous le titre « Qu’est-ce que le racisme ? La définition en procès ». Sur cette supposée faiblesse, l’auteur entend affirmer et proposer un renversement des choses, des perspectives : «  S’il faut, comme Éric Fassin y invite, qualifier une institution de « raciste » dès lors que les personnes « racisées » y sont sous-représentées, il est tout à fait possible, par exemple, que cette sous-représentation soit en partie due à une pression des communautés détournant les individus de s’engager dans cette institution. On en viendrait alors à considérer des victimes de racisme comme coupables de racisme envers elles-mêmes. La notion de racisme systémique, telle qu’Éric Fassin l’explique, mène logiquement à une telle conclusion. » Le racisme systémique deviendrait le fait des racisés envers et contre l’ensemble des institutions. La France serait victime d’un racisme… anti-français. L’auteur le dit, sans le dire : parce qu’il sait que ce propos serait provocateur, scandaleux, et révélerait explicitement et définitivement une adhésion idéologique de sa part à l’idéologie de l’extrême-droite. Pour démontrer que, avec lui, il n’en est rien, il n’y a pas meilleur moyen que de faire référence aux Juifs, à l’antisémitisme. En France, y a-t-il de l’antisémitisme, et si oui, avec qui, comment, pourquoi ?

L’auteur évoque « le rapport de 2016 de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme » (cf. ci-dessus), dans lequel il fut question de l’antisémitisme. Est-ce que ce rapport « a montré l’absurdité de la notion de « nouvel antisémitisme » ? » Pour lui, « En citant entre guillemets le verbe « nuancent », effectivement employé dans le texte de la Commission à ce sujet6, et en ajoutant « pour le moins », Éric Fassin suggère que ce verbe serait un euphémisme. En réalité, pour qui prend la peine de lire ce rapport, les choses apparaissent sous un jour bien différent. La Commission conteste bien que le nouvel antisémitisme chasse l’ancien, en relevant que « les opinions restent structurées par les stéréotypes liés au pouvoir, à l’argent, à la suspicion de double allégeance, bref au vieil antisémitisme ». Mais c’est après avoir souligné, dans la même phrase, qu’il en va tout autrement des « actes antisémites, très liés, depuis le déclenchement de la Seconde Intifada, aux péripéties du conflit israélo-palestinien ». Ce rapport reconnaît donc bien la réalité du « nouvel antisémitisme » ; on pourrait, en conséquence, faire ironiquement remarquer à Éric Fassin que cette notion semble être au moins aussi légitime que celle de « racisme systémique » ». La dite commission aurait donc articulé un ancien et un nouvel, antisémitisme, et, au-delà de cette différenciation, d’un antisémitisme constant. Mais, que ce soit avec ce rapport ou sans lui, est-ce qu’il y a un antisémitisme constant, et de la part de qui ? La situation actuelle française est instructive : il y a des accusateurs et des accusés, il y a des accusés antisémites ET il y a des diffamés, notamment l’ensemble de celles et ceux qui sont totalement opposés à la politique d’un gouvernement d’extrême-droite, en tant que tel, à la tête de l’Etat d’Israël, sans que ces personnes confondent ces Juifs avec les Juifs.

Et ce d’autant plus que dans cette opposition, en France et ailleurs, se font entendre de très nombreux Juifs, de gauche, antisionistes, survivants du génocide juif en Europe, descendants de personnes juives assassinées dans les camps d’extermination. Hélas, des Juifs, français ou autres, se servent de cette situation pour accuser tous ces opposants d’être… antisémites. Cette situation a pourtant révélé, une fois de plus, mais d’une manière inédite dans son intensité, un angle mort que ces prétendus philosémites ignorent ou feignent d’ignorer : l’existence de Juifs…, racistes, suprémacistes, et pour les plus extrémistes, prêts à sacrifier des milliers/millions de vies dans un holocauste nucléaire. Faut-il commettre la même erreur ou faute, intellectuelle, politique, en faisant l’amalgame entre ces Juifs-là, et les autres ? Rien n’y incite, puisque ce serait comme, en France, confondre extrême-droite et extrême-gauche, nier les nuances, différences, politiques pour les ranger dans un même sac, nationaliste-raciste.

Les Français ne sont pas plus unis et un, que les Juifs du monde. Celles et ceux qui ont voulu faire disparaître les différenciations politiques dans un pseudo maelstrom nationaliste peuvent voir leur manipulation être fracassée par les faits. Est-ce que ces nuances et le fait qu’il y a AUSSI des Juifs racistes ont été pris en compte pour la préparation, la rédaction de ce rapport de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme de 2016 ? Il faut lire ce rapport. Si ce rapport n’est ni nul, ni entièrement à rejeter, ni, évidemment, à simplifier, par une caricature, c’est qu’il faut constater que ces auteurs usent, et par l’usage, reconnaissent l’existence de « l’islamophobie », et cette seule reconnaissance leur a sans doute valu d’être voués aux gémonies par celles et ceux qui sont capables de voir du racisme et de la haine envers toutes les communautés, tous les croyants, sauf envers les musulmans; qu’ils traitent sérieusement des considérations haineuses ou discriminatoires de certains catholiques envers les musulmans. Mais dès lors qu’il s’agit des Juifs de France, la seule perspective les concernant est celle, négative, de l’hostilité/haine, avec le « vieil antisémitisme » et la « nouvelle judéophobie », en s’inspirant, hélas, comme d’une pythie jamais prise en défaut, des textes de Pierre-André Taguieff, mais que, jamais, il n’est question de la même hostilité/haine de la part de certains Juifs contre, les musulmans, les Palestiniens, les non-Juifs (chrétiens, etc). Miraculeusement (ce qui évite d’avoir à donner une explication à ce phénomène), les Juifs de France seraient  …, épargnés, purs, de tout racisme envers d’autres. Hélas, des Juifs, en France et en Israël, s’entêtent, semaine après semaine, à démontrer qu’ils donnent, banalement, dans les sentiments et les caractéristiques discursives/doctrinales du racisme tel qu’il est désormais bien connu à travers le monde, à partir de la mondialisation, cette colonisation européenne. Benjamin Straehli pense ce sujet avec les mêmes oeillères : le racisme, de la part de Juifs, n’existe pas, mais par contre le racisme contre les Juifs existe, et, évidemment, il y a des coupables tout désignés. Suivez son regard ? « La Commission conteste bien que le nouvel antisémitisme chasse l’ancien, en relevant que « les opinions restent structurées par les stéréotypes liés au pouvoir, à l’argent, à la suspicion de double allégeance, bref au vieil antisémitisme ». Mais c’est après avoir souligné, dans la même phrase, qu’il en va tout autrement des « actes antisémites, très liés, depuis le déclenchement de la Seconde Intifada, aux péripéties du conflit israélo-palestinien ». Les victimes palestiniennes de la colonisation seraient à la source de ce racisme, même si les plus coupables seraient les personnes qui, à travers le monde, en France, les soutiennent. Implicitement, le propos n’hésite pas à faire des citoyens engagés au soutien des Palestiniens, des antisémites. Comme si les personnes qui, quand l’apartheid sud-africain sévissait, avaient été accusés de racisme anti-blanc, parce qu’elles ciblaient les producteurs de cet apartheid, du sommet de l’Etat raciste sud-africain, jusqu’à ses serviteurs, dans les bases. Ce qui, à l’époque, ne pouvait se dire, en dehors des sphères des activistes de l’extrême-droite, peut être dit le plus « sérieusement » du monde, partout en France et notamment sur les plateaux médiapolitiques où sont invités les « gens autorisés », ayant une « autorité », bien que cela soit absolument scandaleux.

Enfin, c’est dans sa partie finale que Benjamin Straehli donne satisfaction à celles et ceux qui entendent affirmer et convaincre toujours plus de citoyens perdus de faire des liens entre arabo-musulmans, racisme anti-Juifs mais aussi mise en cause religieuse, militante, d’une sacrée laïcité selon laquelle tous les citoyens de ce pays seraient, sont, égaux. « Comme on peut s’y attendre, l’article ne manque pas de présenter les « lois à répétition visant le voile » comme l’expression d’un racisme d’État ». Quelqu’un envisagerait-il de contester que l’adoption de la loi de 1905 a conduit à une confrontation entre des laïcards, anti-cléricaux, anti-catholiques, alliés à des modérés comme Aristide Briand, rapporteur de la loi, qui a agi pour en faire une loi… « oecuménique » et d’oecuménisme, avec l’Eglise elle-même et tant de catholiques ? Puisque, avant cette loi, elle était, en France, la religion d’Etat, et que ses tenants entendaient imposer que la France continue d’être, « la fille aînée de l’Eglise », impose partout, par les écoles et autrement, le prosélytisme catholique.

Certains contestent que l’étude et l’adoption de la loi de 2004 aient visé spécifiquement, ni les catholiques et leurs vêtements, signes, religieux, ni les juifs pratiquants et leurs vêtements , signes, religieux, mais les musulmans, l’Islam. Pourtant, il suffit de se plonger dans les débats publics pour constater que, des discussions en amont de la rédaction de cette loi-string, avec un texte microscopique, à la rentrée 2023 focalisée sur les « abayas », certains Français imposent à tous les autres de n’avoir d’obsession que sur et contre les musulmans. Année après année, le radotage raciste, aura été, en 20 ans, le fait, du gouvernement, de sa majorité, et/ou des médias, et/ou de l’extrême-droite, et parfois, de ces trois larrons en foire. Ce texte y apporte sa contribution, et nul doute que tous les islamo-obsédés de France ont su ont sauront faire connaître à l’auteur leurs remerciements, pour son courage à « affronter le camp du Bien », alors que les adeptes de cette obsession et de leurs mesures discriminatoires prétendent connaître et défendre le Bien nécessaire à la France, apparemment en étant majoritaires, puisqu’ils ont le soutien de la majorité à l’Assemblée Nationale et du gouvernement. Certains de ces étonnants majoritaires-marginaux ont dû être enchantés de lire comment Benjamin Straelhi peut tisser sa toile argumentative, en additionnant les raccourcis, afin de valider des conclusions, pourtant tout aussi sophistiques que ses principes d’interprétation. En effet, il n’hésite pas à considérer que « on pourrait dire, par exemple, que la loi interdisant à une lycéenne de l’enseignement public d’entrer voilée dans son établissement, en s’opposant à une prescription religieuse, crée une difficulté que rencontreront surtout des élèves arabes ou noires, malgré le nombre non négligeable de converties blanches ». S’il semble faire une concession, c’est pour l’annuler immédiatement, puisque, en liant foi musulmane et origine ethnique, il prétend faire tomber à priori l’accusation de racisme par le simple fait qu’il y a désormais un « nombre non négligeable de converties blanches ». Mais si la foi musulmane est désormais partagée par des jeunes avec des origines diverses (et on imagine les ulcères de tant !), dont des blancs, l’Education Nationale, qu’il définit par le fait qu’elle « prétend éduquer les élèves à l’égalité entre hommes et femmes » (alors que nous pensions bêtement qu’elle devait déjà commencer par traiter les élèves avec égalité), a une obligation d’affronter « une règle issue de traditions misogynes de l’Antiquité, et justifiée aujourd’hui encore par des discours ouvertement sexistes » en permettant à des jeunes filles dévoilées, de se trouver à égalité avec une « Blanche » et son privilège, elle qui, selon l’auteur, est nécessairement à distance de telles traditions et d’un tel sexisme. Mais si l’institution scolaire « républicaine » affronte ces « traditions misogynes de l’Antiquité » et ces «  discours ouvertement sexistes » en affrontant des jeunes filles dominées à leur insu, où peut-on voir la même ambition envers les autres jeunes filles, des familles catholiques traditionalistes, des familles juives traditionalistes, et des familles non affiliées à une foi, mais également traditionalistes, sous domination patriarcale ? Ou alors notre auteur va prétendre que ces problèmes n’existent que par les familles musulmanes ?! Où sont les contorsions argumentatives de l’auteur concernant ces autres familles, non musulmanes ? Si la loi de 2004 ne vise pas explicitement, nommément, les musulmans, les jeunes musulmanes, la praxis étatique de cette loi fait connaître l’intention de ses rédacteurs et électeurs. Il faut rappeler le texte de cette loi : « Art. L. 141-5-1. – Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. Le règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire est précédée d’un dialogue avec l’élève ». Là où la loi de 1905 déliait les écoles en France du prosélytisme catholique principalement, la loi de 2004 accorde, de facto et de manière machiavélique, puisque ce n’est pas son propos explicite, un privilège de plus, aux établissements scolaires non publics, confessionnels, dans lesquels le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est autorisée, ainsi, légalement justifiée. Si le concordat allemand maintenu en Alsace-Moselle avait mis un pied dans la porte de la laïcité française, la loi de 2004 a étendu au niveau national, officiellement et légalement, ce privilège des écoles confessionnelles, faisant ainsi, à ces écoles et à leurs gestionnaires, un cadeau, de plus, immense, au désavantage des écoles, collèges et lycées publics, pour la majorité, pauvre, en France. Et comme si cela ne suffisait pas, ils y ont ajouté un traitement particulier réservé aux enfants des familles musulmanes, comme c’est toujours dans le cas avec les Etats séparatistes, inégalitaires, comme l’est la France depuis… L’auteur, un bon Français de notre temps, n’hésite pas à jouer des divisions entre les familles musulmanes qui vivent avec une prescription religieuse et les familles musulmanes, qui vivent sans, ce qui lui permet d’affirmer implicitement que la loi, pas plus que lui, n’est raciste – vous voyez, il se met aux côtés des familles sans prescription religieuse.

Pour conclure, l’affirmation de l’auteur selon laquelle « La question qui a servi de point de départ à mon examen était de savoir si la confusion que semble véhiculer cette notion, et qui est relevée par Matt Lutz, provient uniquement d’une incompréhension de la part du grand public. Une lecture critique de l’article d’Éric Fassin suggère une autre hypothèse : le mal pourrait venir de la façon même dont les promoteurs les plus experts de la notion en font la publicité » paraît être une auto-admonestation, par laquelle l’auteur s’expose et se condamne lui-même, et ce dès lors qu’il ajoute qu’« Il n’y a, certes, aucune conclusion à en tirer quant à la qualité de ses travaux académiques, dont ce texte ne fait pas partie. Et il serait hasardeux d’en tirer des conclusions générales sur la notion de racisme systémique, qui ne peut être tenue pour responsable de tout ce que l’on écrit sur elle ». Ce n’est que dans sa dernière phrase que l’auteur définit la modestie de son propos puisque « Cette hypothèse ne pourrait être confirmée que par l’examen d’un grand nombre d’autres textes ; je ne peux conclure ici qu’à l’inconsistance de celui que j’ai critiqué », mais cette modestie est-elle sincère ? L’examen de ce texte n’a-t-il pas pour objet de suggérer une inférence d’un cas particulier, un texte, à une pensée, logique, système ? Rappelons que, quand il s’agissait de citer, pour l’approuver, Matt Lutz, l’auteur a pu écrire qu’« un tel procédé » (celui assigné à Eric Fassin et d’autres) « détourne les esprits d’une véritable recherche des mécanismes qui produisent ou entretiennent le phénomène ainsi nommé, tout autant que d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre », le phénomène ainsi nommé existe donc bel et bien puisqu’il lui manque seulement « une véritable recherche des mécanismes qui produisent ou entretiennent le phénomène ainsi nommé, tout autant que d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre ». Ne pouvant opposer un travail académique existant et probant, l’auteur a abordé le problème par le fait d’actualité et son commentaire médiatique, afin de contredire, si ce n’est l’existence d’un racisme systémique, négation qui dépasse ses capacités et sa volonté, à tout le moins l’existence d’un racisme systémique en France, par des institutions étatiques, la police, l’Education Nationale, pour ne reconnaître qu’un racisme certain dont l’Etat est pur de toute responsabilité selon lui, celui visant les Juifs avec l’antisémitisme, dont les coupables seraient les mêmes qui se présentent comme des victimes d’un racisme d’Etat. Si ce texte est à plusieurs titres détestable, c’est qu’il n’est pas franc du collier : avec un ton intellectuel typique, « modéré », calme, il n’hésite pas à affirmer les mêmes horreurs qu’il est possible de lire chaque jour sur les comptes RS de radicalisés, débarrassé de leurs outrances, violences. Il devrait permettre à l’auteur de bénéficier des applaudissements et des remerciements si concrets du pouvoir en place qui a besoin de trouver des remplaçants aux figures essorées du Printemps Républicain. 

Comment comprendre la publication d’un tel texte, par Benjamin Straehli ? Si l’auteur prétend reconnaître, « le phénomène ainsi nommé », que « dans les sociétés occidentales, les personnes non blanches sont surreprésentées parmi les chômeurs, les prisonniers, les pauvres… Il y a donc bien un ensemble d’inégalités sociales corrélées à l’origine ethnique ou à la couleur de peau », qu’il est justifié, nécessaire de faire exister « une véritable recherche des mécanismes qui produisent ou entretiennent le phénomène ainsi nommé, tout autant que d’une recherche rationnelle des meilleurs moyens de le combattre », le résumé de son propos se définit par une contestation, si ce n’est du caractère systémique de ce racisme, mais jusqu’à l’existence du racisme lui-même, et, surtout, du racisme sur et contre les dits « racisés », mais ne s’interdit pas de penser qu’il existe un racisme anti français, ou contre les institutions et leurs dirigeants, de la part des mêmes racisés. Il faut dire que, d’emblée, sa propre définition du racisme est problématique, puisqu’il le réduit à une force par laquelle il y a « un ensemble d’inégalités sociales corrélées à l’origine ethnique ou à la couleur de peau », et à « des discours affirmant l’existence et l’inégalité de races humaines ». Présupposés, effets systémiques, logiques structurelles, disparaissent de cette définition partielle et partiale. Et, pour se faire, il n’hésite pas à utiliser le cas d’un français, racisé, pour l’accuser d’être lui-même coupable de racisme, contre une autre racisée, qui, sans lui et sans cela, démontrerait qu’il suffit de vouloir s’intégrer pour qu’il n’y ait aucun problème. L’auteur paraît ignorer ou feint d’ignorer que des jeunes, qui vivent dans des quartiers ghéttoïsés, séparés des autres quartiers par une identification raciale et raciste, qui ont des diplômes, des compétences démontrées, ont été et sont sujets à des discriminations, sur leur seul nom, leur adresse, leur physique, leur supposée foi, alors qu’ils essaient de « s’intégrer », en commençant par un travail. Mais, quoiqu’il en soit des dénégations de ces chantres d’une prétendue égalité « républicaine », en droit comme en fait, leurs expressions publiques ne font que confirmer l’existence de ce racisme systémique, étant donné le nombre d’entre eux qui s’expriment sur ce sujet, le nombre de leurs dénégations, le nombre de leurs contorsions intellectuelles pour justifier l’injustifiable, pour prétendre, comme n’importe quel sophiste de télévision, que le réel est le juste…

  1. https://www.persuasion.community/p/the-problem-with-systemic-racism
  2. Cf. « Racisme social, théorie interdisciplinaire des pratiques ploutocratiques de différenciations sociales », page 463. 
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Mezetulle
10 mois il y a