Un extrait (le début), de cet article publié par Médiapart
Une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP) insiste une nouvelle fois sur le fait que les 0,1 % les plus riches sont les grands gagnants du quinquennat. Mais la réalité globale pourrait être encore pire que ce qu’elle décrit.
La bataille du bilan du quinquennat d’Emmanuel Macron en termes de redistribution fait rage. Début octobre, la Direction générale du Trésor (DGT) avait publié un compte rendu des effets des mesures prises depuis 2017 dans le cadre du Rapport économique social et financier 2022 qui accompagne la loi de finances. Ce rapport avait fait grand bruit : il prétendait que, au total, les 10 % les plus modestes des Français avait vu leur niveau de vie progresser de 4 %, tandis que les 10 % les plus riches n’avaient vu leur niveau de vie progresser que de 2 %. Emmanuel Macron était subitement devenu le président de la baisse des inégalités, ce que les membres du gouvernement n’ont pas manqué de souligner ces derniers jours. Mardi 16 novembre, une nouvelle étude est cependant venue démentir ce récit. L’Institut des politiques publiques (IPP), un institut indépendant qui réalise chaque année une évaluation des effets des choix budgétaires, a en effet publié à son tour un bilan du quinquennat. Si, comme la DGT, l’IPP souligne que le niveau de vie global sur le quinquennat progresse de 1,6 % en moyenne sur l’ensemble de la population, les 5 % les plus pauvres sont les moins bien lotis. Leur niveau de vie a baissé, avec un recul de 0,18 % pour les 1 % les plus pauvres. En revanche, les plus riches ont bien été à la fête : les 1 % les plus riches ont vu leur niveau de vie augmenter de 2,8 %, soit la plus forte proportion de l’ensemble de la population que l’IPP a divisé en centièmes selon leur niveau de revenu.Impact des mesures budgétaires par centiles de revenus. © Infographie IPP
Et encore cette hausse cache de très fortes disparités. Ce sont bien les plus riches des plus riches qui ont profité du quinquennat, selon l’IPP, avec une hausse de 4,06 % du niveau de vie des 0,1 % les plus riches de France. Autrement dit, l’effet des choix du gouvernement a bien été de creuser les écarts entre les ultra-riches et les très pauvres : en termes de niveau de vie, les 0,1 % les plus riches sont ainsi 4,24 % plus riches que les 1 % les plus pauvres sur le quinquennat. Les mesures ciblées sur la fiscalité du capital – fin de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, sur le patrimoine et prélèvement forfaitaire unique (PFU ou flat tax) sur les revenus du capital – expliquent largement cette situation. Reste que le résultat est donc absolument inverse à celui de la DGT. Mais il n’est pas surprenant pour autant. Les méthodologies des deux études sont en effet différentes parce qu’elles ont des objectifs différents. L’étude de la DGT tentait d’appréhender l’évolution sur la période 2017-2022 sans isoler les mesures prises par l’exécutif en place et en se limitant à celles effectivement mises en place durant le quinquennat. Sa vision était donc chronologique. Elle a donc intégré dans son étude des mesures prises sous le quinquennat de François Hollande, comme la revalorisation du RSA, et a exclu la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % les plus riches qui ne sera en place que l’an prochain. À l’inverse, l’IPP a cherché à évaluer l’impact des mesures prises durant le quinquennat. Sa démarche est donc plus politique : elle cherche à évaluer l’effet sur la redistribution des choix pris par Emmanuel Macron. C’est pourquoi les calculs de l’IPP intègrent la suppression complète de la taxe d’habitation et exclut les mesures héritées du quinquennat précédent. Par ailleurs, l’étude de l’IPP est plus précise en descendant au centile près, autrement dit en fractionnant la population en cent parts égales selon les niveaux de revenus, là où la DGT se contentait d’un découpage en déciles. Or, les différences au sein des déciles sont considérables en empêchent de disposer d’une vision précise de la situation. Ainsi, ramenés en déciles, l’étude de l’IPP montre un gain de niveau de vie de 1,21 % pour les 10 % les plus pauvres et de 1,4 % pour les 10 % les plus riches. Mais ces chiffres, on l’a vu, cachent de grandes disparités à chaque extrémité de la distribution.Effet des politiques budgétaires du gouvernement sur les 1 % les plus riches. © Infographie IPP
Pour être bref : https://www.mediapart.fr/journal/economie/171121/le-quinquennat-macron-bien-ete-celui-des-ultra-riches