2021 aura été l’année de la commémoration (on ne peut plus discrète) de la « Commune de Paris » ou de « la Commune » – commémoration pour certains, puisque d’autres, eux, font l’éloge des Versaillais qui ont massacré les Communards – les Communeux selon le terme qu’ils préféraient. Dans cette France poly- traumatisée par des préjudices multiples accumulés dans le temps (du bras d’honneur des puissants à l’égard du vote des citoyens sur et contre la Constitution Giscard de 2005), jusqu’aux plus de 100.000 morts (morts de quoi ? Du Covid ou, principalement, des mauvaises décisions politiques ?), en passant par le quinquennat cauchemardesque de François Hollande, sis sur le reniement d’un certain nombre d’engagements et de principes, en passant par les violences subies par les citoyens qui ont manifesté à l’occasion du mouvement des Gilets Jaunes et depuis, en passant par la continuelle augmentation du chômage et du nombre de plus pauvres, etc., le désarroi civique n’a jamais été aussi marqué, avec ses conséquences, la résignation, le fatalisme, la simplification des causes de cette situation par les accusations portées vers des étrangers pauvres (les migrants), à l’incitation de l’extrême droite, le survivalisme suicidaire (!), les suicides, les mutilations, la fuite, physique, psychique. On ne le dit pas assez : vivre en France est devenu, pour tant de Français, un cauchemar.
Tout est bon pour détourner les consciences des véritables sujets, enjeux, tout est bon pour maintenir le système français, bien que la putréfaction de ce système ait été conséquemment, totalement, définitivement, analysée comme telle par tant de savants, analystes, citoyens, engagés. Le consensus sur cette dramatique situation française est un fait, est important, et sur cette base, beaucoup disent : c’est insupportable, et nous ne pouvons continuer. Mais quand il s’agit des PERSPECTIVES qu’il faut se donner ET donner pour rendre possible cette sortie de cette nasse civique, il faut bien constater qu’il y a ou un silence ou des généralités… « généreuses », qui sont et resteront, sans portée. Pour prendre un exemple concret, fondé sur un sujet devenu une vérité, une affaire, publiques, en France, ces derniers mois, à savoir les agressions/exploitations sexuelles d’enfants/adolescents par des adultes, des violences sur et contre des enfants par des adultes, on a pu entendre des tribunes défendre en tant que réponse, sociale, politique, à ces faits, « la libération de la parole » alors même que si ce sujet était en train de devenir une telle vérité, c’est, précisément, parce qu’il y avait une « libération de la parole ». Donc, à l’occasion d’une « libération de la parole », défendre que, pour progresser face à de tels faits, dramatiques, préjudiciels, il FAILLE libérer la parole, on assiste donc à l’invocation du fait pour qu’il devienne un droit – alors qu’il existe déjà, et que la parole « libérée » est, certes, positive, mais elle est fondée sur des maux qui auraient dû ne pas se produire et qu’il s’agit d’empêcher, en amont. Il faut donc faire face à ce courant social qui s’auto-qualifie de « réformistes » alors qu’il consiste à accompagner le système dans ses principes et dans ses logiques, sans jamais s’attaquer à ceux-ci, et qu’il ne s’engage sur la voie d’aucune « réforme ». Dans le droit du travail français, la prétendue « réformiste » CFDT ne soutient, pas, jamais, aucune réforme réelle, mais se contente d’accompagner la déconstruction, étape par étape, du droit du travail – lequel, auparavant, n’était pas, n’a jamais été, exceptionnel, formidable, protecteur des travailleurs. À l’inverse, s’il est un courant qui est, sincère, honnête, cohérent, clair, c’est celui des « conservateurs », puisque, par essence, ses adeptes entendent conserver le système français tel qu’il est (avec, « le » patrimoine, « le » récit historique national, les mêmes représentants, porte-parole, les mêmes règles fondamentales), et, face à eux, il y a des antisystèmes, ou sincères, ou de comédie, ou naïfs. Et c’est dans cet ensemble des antisystèmes que les principaux problèmes se posent : la conscience/connaissance de ce qu’est le système, ou l’ignorance, la volonté de dépasser ce système, ou cette absence de volonté.
Le symbole de ce simulacre d’engagement sur et contre ce système a été, est, le PS français, dont une sociologie des dirigeants, depuis Mitterrand, aurait pu permettre de conclure à la très haute probabilité de la trahison à l’égard de certains engagements publics et des travailleurs en France, mais que le cinéma français sur et pour les « personnes bienveillantes » a mis en scène pour laisser penser que, malgré eux, ou par miracle, ou par illumination, ils se résoudraient à agir pour le mieux, pour l’intérêt commun. Si, désormais, ce parti est réduit à croupir dans les basses eaux électorales nationales, sa base municipale continue d’être importante, et, quand il faudra rendre service à ce système, il le fera, comme il a pu le faire en 2016-2017, en préparant le succès d’une nouvelle majorité politique qui, loin d’être ni de droite ni de gauche, associe droite et « gauche » – si tant est qu’il soit cohérent, acceptable et juste, d’intégrer le PS à la gauche historique en France ; associe donc droite et PS, avec ce qui les unit, le soutien au structurel « libéralisme » à la française.
Pourquoi parler de ces partis et de ces personnes ? Parce qu’il faut bien traiter de la question, simple, fondamentale, décisive : qui a le pouvoir en France, qui EST le pouvoir en France ? La Constitution française actuelle met en avant les partis, en tant que marche pied pour l’accès aux pouvoirs législatifs et exécutifs. On entend dire que les partis sont dépassés, que les Français vouent aux gémonies les partis, mais, dans les faits, les partis continuent d’être les maîtres de la France et des Français – une partie de ces maîtres. L’actuel locataire de l’Élysée a même mis en place en quelques semaines son parti et a réussi à obtenir de l’électorat français, de droite et de PS, une majorité. Qui parvient à être élu ? Sociologiquement, les profils de ceux-ci sont clairs : ils sont bourgeois, par exemple, médecins, avocats, hauts fonctionnaires, chefs d’entreprise, etc. Nous vivons donc dans une République censitaire où la majorité des citoyens peuvent voter mais une minorité d’une minorité a le droit d’être élue. Nous avons affaire à des professionnels de la politique. Nous avons eu des dinosaures : sur plusieurs décennies, tels des Seigneurs du Moyen-Âge, ils étaient, élus, réélus, rééééééélus, jusqu’à ce que ce mort s’ensuive. Même si ces profils semblent désormais plus rares, la majorité des élus actuels ont déjà eu un mandat, ou des mandats, et surtout, en veulent d’autres. Comment ces élus vivent-ils, avec leur rémunération, les règles politico-économiques qui s’appliquent à leur(s) mandat(s) ? Bien souvent, ces habitués du confort travaillent « confortablement », dans des cadres où tout est assuré, par des moyens financiers importants, par des armées de petits soldats. Jacques Chirac, maire de Paris, a fait payer aux finances de la mairie, ses « frais de bouche », par des achats constants, quotidiens auprès d’un traiteur bien connu, réservé aux pas fauchés parisiens. Un président de la République vit dans un palais de l’Ancien Régime. Les Présidents des assemblées vivent dans un confort bourgeois du 19ème siècle. Les élus ont des avantages salariaux spécifiques. Cette classe sociale qui s’est organisée pour se garantir une sécurité économique, c’est d’elle que, pendant ces dernières décennies, des décisions régulières pour la précarisation généralisée ont été prises, engagées, imposées, et ce, contrairement à la volonté générale. Il y a les revenus légaux et il y a les rémunérations illégales. Il faut bien prononcer le mot qui fâche (certains sont fâchés par le mot mais pas ou peu par la réalité qu’il désigne) : la corruption. Et il faut tout de suite dire que, évidemment, il est impossible de généraliser en invoquant le « tous pourris », mais que les mêmes qui évoquent pour l’accuser, cette généralité, prétendent en imposer une autre, toute aussi fausse : nul n’est corrompu ou si peu. Il faut être sérieux, et, sur ce sujet, certains nous y aident, parce qu’il y a des études, nationales, internationales, sur « la » corruption. Et si la corruption (traduisons : l’enrichissement financier maximal en peu de temps et par des moyens illégaux, l’obtention de faveurs, avantages, par un paiement également illégal) n’est pas généralisée, elle est, selon les éléments dont on dispose, si… « systémique » qu’on ne lutte pas contre elle et ses responsables/coupables avec des moyens faibles, des lois faibles, et peu de professionnels dédiés. Or il ne faut pas attendre des professionnels de la politique dont certains sont puissamment liés à ce système qu’ils mettent en place les moyens de lutter contre lui. La protection générale dont bénéficie cette corruption dépend donc structurellement des législateurs et dirigeants, de ces professionnels de la politique. Quand la pensée politique s’est mise en place pour la première fois dans les œuvres de Platon, celui-ci a considéré que pour penser une cité durable (ce qui, à son époque, était rare, et ce qui depuis a été confirmé moult fois dans l’Histoire humaine mondiale), il fallait en passer par une telle « professionnalisation » de ceux qu’il a qualifiés être « les gardiens de la cité », mais pour qu’ils deviennent ainsi, il a établi qu’ils devaient être formés dans leur indifférence, désintérêt, pour les avantages matériels, qu’ils devaient être formés pour être « incorruptibles ».
On peut dire que, avec l’Europe dite « moderne », laquelle, pourtant, est constituée sur des régressions morales inouïes, qui se manifestent avec la pseudo « Renaissance », le début de la marchandisation de tout par tous, avec la colonisation, criminelle et esclavagiste du monde, jusqu’au nazisme, qui est le crépuscule de ces « Dieux » titanesques, nous avons affaire au paradigme inverse : les professionnels de la politique doivent être corrompus et corrupteurs. Telle qu’elle est énoncée, la Constitution française actuelle n’exprime aucun engagement principiel sur et contre cette corruption, alors que le système économique mondial, fondé sur « la finance », la rend possible et en dépend. Et c’est si pratique de ne rien dire sur ce sujet : pas d’engagement… donc, pas de problème. Il faut dire que même quand un principe est supposé « engageant », il n’est pas respecté. Dans cette Constitution si peu liée à ce que sont et veulent les citoyens de ce pays depuis longtemps, cette Constitution si technocratique, aux mots si peu chaleureux et forts, eu égard à la langue et à l’Histoire de France, on sait que De Gaulle a obtenu de ses rédacteurs amis que, pour la présidence, le costume d’un Roi bis lui soit taillé, afin d’avoir les coudées franches dans son exercice. Depuis, bien que le costume soit devenu trop grand pour les comédiens qui l’ont enfilé, ces bénéficiaires se sont servis de ses prérogatives avec une joie gloutonnesque, passant du statut de citoyen comme les autres à celui de citoyen pas comme les autres, avec une aisance et une autosatisfaction qui en disent long sur le désir qui les a mus. Cet omni-président, qui personnalise le régime, s’appuie sur des pouvoirs démesurés, plus importants encore que celui des États-Unis (pour déclarer la guerre, un Président en France peut décider seul !), et il est l’arbitre de toute chose. Le système suppose son omni-science (il est capable de tout comprendre), comme son omni- bienveillance, sauf que, quand il ne l’est pas, le pays entier en supporte les conséquences. Pour devenir ce maître de tout et de tous, le candidat doit bénéficier d’une image nationale, construite par des narrations positives : ce que nous appelons à notre époque, une « publicité ». Et entre les Présidents de la 5ème République et le monde de la publicité, il existe un rapport si étroit que le libéralisme toujours plus approfondi via le successeur du prédécesseur, a favorisé les droits, les entreprises et les moyens de « la » publicité, sur le modèle américain, désormais modèle en tout. Depuis plusieurs années, les publicités sévissent partout, surtout sur tout : cette nouvelle sophistique n’a aucun frein à ses « rêves », comme les défendait Jacques Séguéla en face d’un Michel Clouscard, plutôt tétanisé et silencieux face à cette voracité annoncée. Bien qu’elle soit fondée sur l’ignorance de ce qu’elle promeut, elle le fait, contre monnaie sonnante et trébuchante, parce que, avec les pubards, s’il faut vendre père et mère, c’est possible. Les pubards médiatisent leurs bobards, mais si une publicité est mensongère, le « messager » n’est jamais en cause – en droit comme en fait. La publicité repose bien sur le droit de dire tout ce que l’on veut, quoi qu’il en soit de la véracité ou non de ce qui est dit, sans conséquence – et personne n’attaque ces entreprises prospères, à commencer par des groupes sociaux, à l’occasion d’une manifestation. Pourtant, ce sont elles qui scénarisent, mettent en scène, en avant, ce sont elles qui mentent.
Or, ces dernières années, décennies, nous les avons laissés, royalement, tranquilles. Aucune revendication pour interdire leur occupation des espaces, physiques et mentaux. Nous laissons faire cette politique du laisser faire. Nous nous taisons, aussi parce que ces champions occupent cet espace par tant de bruit pour rien. Et les lois politiques votées accompagnent cette colonisation de nos espaces extérieurs et intérieurs. Désormais, y voir des enfants est devenu, en France, banal. Aucun problème. Y voir des morts, parce que les ayants droit concèdent, banal. Y voir des « stars » dont les revenus spécifiques sont déjà délirants, et qui, par ces publicités, en ajoutent de nouveaux, banals. Y voir la promotion de nourritures corporelles comme mentales, néfastes, dangereuses, banal. Et nous ne disons rien. La déconstruction de tout ce qui se limitait les désirs voraces s’est évidemment attaquée, centralement, au mal nommé, « droit du travail », comme si ce champ exposait et protégeait les « droits » des travailleurs, alors qu’il y a la codification des droits sur et contre les travailleurs par leurs exploiteurs, dont ce « droit » protège tant de libertés, comme celui de licencier, sur n’importe quel coup de tête, de sang.Les rares et faibles limites qui avaient été acquises pour que ces désirs ne puissent être plus nombreux et aller plus loin ont été ou supprimées ou affaiblies, permettant une nouvelle extension de la tyrannie du propriétaire producteur. C’est ce que leur nombre, dans ce qui les rassemble, leur corporatisme qui est toujours un caporalisme, ose appeler « la liberté de l’entrepreneur » dont le concept convient autant à un fou très entreprenant, qu’à un criminel très entreprenant, qu’à un voleur très entreprenant. Or, pour le libéralisme pratique (le droit écrit), qu’importe le désir d’enrichissement, qu’importent les moyens pourvu qu’il y ait l’ivresse. Quand il s’agit de cette « liberté » (ce désir), le libéralisme entend ne rien décider, mais, en le rendant possible, le décider tout de même. Mais quand il s’agit de la « liberté », nécessité, d’un travailleur, de se reposer, pendant sa pause, légale, d’acheter avec quelques bons destinés à cet effet, un repas, etc., le même libéralisme va soutenir, in concreto, leur interdiction, en soutenant le licenciement de fait – et, si une chambre de droit désormais de plus en plus affaiblie et minorée, les Prud’hommes, le décide, d’octroyer au licencié une « réparation », bien symbolique. La perte d’un travail, elle, ne se répare pas – pas plus qu’un œil détruit à coups de LBD. Quand il s’agit de se payer sur les productions, les échanges, le même « libéralisme » défend l’absence de limite pour la rémunération financière, mais quand il s’agit de la rémunération des travailleurs eux-mêmes, celui-ci peut défendre une limite basse, non pas par générosité, mais pour y fixer la majorité des travailleurs, y compris en permettant que leur rémunération réelle se situe juste au-dessus de cette limite. Aucune limite pour les uns, des limites draconiennes pour les autres. « Liberté » du désir ploutocratique des uns, absence de liberté(s) pour les autres.
Loin d’en avoir fini avec l’esclavage, nous avons bien à faire à des « maîtres » et à ceux qui les servent – définition de l’esclavage. Évidemment, au regard de l’esclavage historique, qui reposait sur l’appropriation de l’ensemble de la personne, sur l’absence de réciprocité par une production dont l’intérêt était à sens unique, l’esclavage salarié doit se payer, mais la mise en place de celui-ci n’a jamais relevé d’une philanthropie inédite et émouvante, mais de l’intérêt bien calculé des rentiers du 19ème siècle et depuis : des esclaves qui peuvent payer, par leur nombre, c’est le moyen de décupler les fortunes des plus fortunés, en leur permettant de s’accroître toujours plus. Dans ce monde, en une minute, en une heure, des êtres humains peuvent percevoir une rémunération, à laquelle donc une autre, et une autre, et une autre, vont s’ajouter, qui dépasse celle qu’un autre être humain percevra en 10 ans ou en une vie. Le néolibéralisme a été conçu pour organiser et justifier ce ruissellement, qui fait entendre un bruit assourdissant. Nous entendons les chutes du, tonnerre. Il pleut des maisons, des diamants, des tableaux de maître, des serviteurs, des terres, etc., nous sommes détrempés, et nous laissons, aussi, faire, puisque nous n’exigeons pas l’ encadrement des rémunérations, des prix, des loyers, nous n’exigeons rien, nous ne voulons rien. C’est sans doute déplaisant à dire, à reconnaître : nous sommes apathiques, apathétiques. Aussi, si le monde pourrait bien être détruit par ceux qui font le mal, ceux qui les regardent sans rien faire seraient alors complices de non-assistance à monde en danger. Est-ce que nous nous aimons si peu que nous acceptions de laisser faire cela ? Est-ce que nous aimons si peu et nos aïeuls pour ce qu’ils ont fait, gagné et nos enfants pour ce qu’ils pourraient être de remarquable et de sublime, au point que nous laissions faire ? Comment empêcher que des personnes développent de tels désirs, de domination/destruction ?
Notre espèce ne nous a pas attendus pour concevoir que, eu égard à ces malades, souffrants, dangereux, pervers, il faut agir, a priori, en amont, en les rendant impossible, non pas par un contrôle des naissances, eugéniste, mais par une véritable « éducation » qui ne soit ni un dressage, comme le fut « l’éducation noire » en Allemagne au début du 20ème siècle, ni un laisser-aller sans sens. Il faut dialoguer avec les consciences. Ce qui devrait être un principe structurel dans ce pays, dominé par le monologue de la classe du pouvoir-de-la-parole, est vivant au sein de l’Éducation Nationale, par la bonne volonté des professeurs et des jeunes, par les compétences également des professeurs, et de ce point de vue, l’école en France fait bien mieux que la vie sociale et publique en France, contrairement à ce que tant se plaisent à dire sur cette école pour l’accuser de tous les maux et l’affaiblir. Mais même si la bonne volonté limite les dégâts provoqués par les choix politiques tant en matière de forces au travail que de sens des pratiques pédagogiques, ces choix font barrage à une éducation ambitieuse, adaptée tant au niveau des connaissances actuelles, à leur complexité, qu’à l’efficacité d’une « transmission » pour laquelle le système actuel affirme sa réalité améliorée par l’existence et l’usage des moyens informatiques, alors que la mémoire dépend d’une cohérence et d’un travail réel d’intégration des données. Là encore, il ne faut rien attendre de ces somnambules, ou pire, de ces zombies, dont l’unique mantra est : la machine, plutôt que l’homme, d’autant que, « idéalement », la machine, selon leur politique, rend possible, dans la « mutualisation des moyens », des suppressions de poste, négation qui leur apporte des jouissances incommensurables.
Mais le problème « éducatif/cognitif » ne se limite pas à la jeunesse : la plus grande partie de la population, adulte, croit être éduquée/instruite, au motif qu’elle a aussi suivi une formation scolaire a minima, et qu’elle dispose de médias d’information qui lui proposent chaque jour, des informations et des connaissances. Il est hautement comique/tragique de constater qu’il y a beaucoup de citoyens dans ce pays qui pensent sérieusement qu’ils apprennent sérieusement des choses avec une émission de télévision, comme « Secrets d’Histoire » et consorts. Pourtant, à l’instar de tant de pseudos « informations », ces « connaissances historiques » sont tout aussi frelatées, comme le démontrent régulièrement des spécialistes, présents sur un réseau social, et qui passent une émission au peigne fin. Il n’est pas rare que, pour une émission, ce travail d’analyse produise un carnage : une liste longue comme un jour sans pain, d’erreurs, approximations, réductions, mensonges. Mais désormais, d’une manière encore plus amplifiée que ce n’était le cas dans les décennies antérieures (qu’il ne faut pas idéaliser, les médias français étant très mauvais depuis longtemps), le faux est un élément structurel des récits médiatisés, et il s’agit là aussi, d’un choix, assumé. Le problème social et politique qui est posé, c’est que, eu égard à une population adulte qui, majoritairement, fait confiance à de tels médias, en les écoutant, regardant, quotidiennement, sans formation critique, sans distance, l’imprégnation des consciences et la manipulation des consciences par ce mixte de vrai et de faux, atteignent un tel niveau que le travail, les réponses, critiques, sérieuses, sont inaudibles. La stratégie du pouvoir financier depuis des décennies est de monter le son – et de ne jamais couper le son, en saturant tellement l’espace auditif que les paroles humaines, les cris, les S.O.S, soient inaudibles. Les médias sont aussi et surtout un « mur du son » qui, chaque jour, fait un bruit du tonnerre dans les consciences. La nature des dominants a horreur du vide, et, pour donner l’ impression qu’il n’y en a pas, il faut impérativement donner une autre impression, d’une existence, par du bruit. Mais en voulant divertir, certains ne peuvent pas s’empêcher de révéler le pot aux roses : des médias où il s’agit de bavasser, travaillent, quotidiennement, de plus en plus clairement pour de plus en plus de citoyens, à protéger leurs propriétaires/maîtres, devenus depuis quelques années des milliardaires grâce au détournement de fonds, légaux, qu’ils appellent « actions, dividendes, bénéfices, retours sur investissement ». Mais ce de plus en plus…, reste très loin d’être majoritaire. Entre-temps, les dégâts provoqués par ces moyens de la manipulation peuvent être conséquents. Il faut donc couper le son – et, à la racine, reprendre la main sur les médias, et ce sujet doit être une priorité d’un programme politique de renaissance, révolutionnaire : l’indépendance ne doit pas être un slogan, une de ces formules de la novlangue qui honore le contraire de ce que ces promoteurs font, mais un principe déterminant, dont la mise en œuvre repose à la fois sur la législation, à modifier impérativement pour faire des médias des organisations et des moyens en lien avec la population, sur la déontologie journalistique. En l’état actuel des choses, ces moyens servent : servent, tout court, les puissants qui en sont parfois propriétaires, ou ont leurs amis à la tête de ; mais aussi à les honorer, et inversement, à ne pas parler des plus faibles ou à en parler, mal, peu, ou beaucoup, avec dédain, des mensonges. Nous avons donc un système qui marche sur la tête : les puissants, lesquels n’ont pas besoin d’être protégés, respectés, le sont, et l’inverse des puissants, les plus faibles, ne sont pas, par ces médias, protégés, respectés.
Il s’agit donc de renverser la « logique », illogique, du système français, en faisant en sorte que, concernant les aides aux familles comme pour les sujets médiatiques, les forts aient peu, et les faibles aient beaucoup. Parmi les faibles, il y a, les enfants, et notamment les enfants, de familles violentes, ou abandonnés. Ces êtres, fragilisés par une naissance dans un cadre affaibli, défaillant, incapable de les prendre en charge, quand ce n’est pas pire, doivent impérativement devenir protégés, par une détection rapide des situations et des problèmes, par des décisions cohérentes et réellement protectrices, par le retrait de toute autorité parentale à des parents biologiques violents. Actuellement, des enfants placés sous la tutelle de l’État, des départements, sont, du jour au lendemain, à leur 18 an, jetés à la rue, et deviennent des sans domicile. Donc l’État français considère que, à des personnes qui ont été fragilisées par la vie, il a le droit d’ajouter une nouvelle couche de préjudices/violences. Et avant de les mettre à la rue, leur prise en charge peut être défaillante, avec des « éducateurs », violents, agresseurs. Quant aux personnes contraintes d’essayer de survivre sans un habitat humain, à la rue, est-il besoin d’expliquer qu’elles sont si fragilisées qu’elles sont en danger de mort, si ce n’est de mort, physique, mais, pour commencer, cérébrale ? Combien de personnes qui sont à la rue souffrent de traumatismes ? Puisque ce sont celles auxquelles le système actuel porte le plus de préjudices, ce sont ces personnes qui doivent être concernées par la première mesure politique, ce qui engagera un changement de paradigme, puisque l’immense majorité des citoyens en France ne seront pas concernés directement et personnellement par cette mesure, mais ils auront été celles et ceux qui l’auront décidé. D’autres femmes et hommes subissent des violences systémiques, avec le poison qui continue de neutraliser la conscience sociale en France, avec la promotion, par l’extrême droite, d’un racisme doctrinal et sa mise en œuvre quotidienne, avec, des insultes, des menaces, des agressions, et parfois, des meurtres. Les discriminations contre les « racisés » sont multiples, gravissimes : ces citoyens subissent un apartheid français, plus subtil, pervers, que celui de l’ Afrique du Sud, puisqu’il n’est pas officiel, puisqu’il est officiellement contredit par les lois et les discours publics. Les militants décoloniaux qui le visent explicitement sont donc parmi les plus conscients et les plus courageux. Et cette logique du décolonialisme nous concerne toutes et tous : nos espaces sont colonisés par les mêmes logiques et les mêmes personnes que les espaces des « colonies » l’ont été, et cette colonisation a construit cette « France »/rance, comme elle continue de le faire. Ce n’est pas pour rien que la « propriété privée » est un dogme aussi ancien et aussi décisif pour ce système. Il faut dire qu’il y a bien une « propriété privée » justifiée : le corps de chacun, nos biens intimes, notre vie intime elle-même, mais la propriété privée extensive, au-delà de la perception de notre corps, au-delà de l’horizon, avec une accumulation de biens/services comme si un « fortuné » avait 10 vies, 100 vies, pour en jouir, est délirante, injustifiable et injustifiée, bien que beaucoup s’y soient attelés, croient pouvoir le faire et l’avoir fait. Or, à l’égard de cette propriété privée étendue, extensive, illimitée, les militants décoloniaux prolongent, à leur façon, ce que le communisme historique a porté, incarné, et ce n’est pas pour rien que l’expression d’extrême droite, islamo-gauchiste, est venue, comme dans un palimpseste, se placer au-dessus de celle de judéo-bolchévisme. Ce qui en dit long sur le caractère révolutionnaire de ces décoloniaux. L’engagement de ceux-ci ne peut pas être accusé d’être artificiel : les discriminations, pour eux-mêmes, leurs parents, leurs cousins, leurs amis, ils les ont vécues dans leur chair, et ils ont été celles et ceux qui, parmi les plus prolétarisés, ont décidé de ne pas, plus, se laisser faire, relever la tête, parler, s’organiser, toute chose que les caricaturistes et diffamateurs les concernant leur reproche. Ce « sois prolétaire et tais toi » est tout aussi insupportable qu’aujourd’hui.
Parmi les personnes qui liront ce texte, il est quasi certain qu’il y aura une réflexion pavlovienne : « c’est utopique ». Mais cette réflexion, nulle, doit être balayée : notre existence actuelle est, au regard des générations antérieures, « utopique », au sens de, « impossible », et l’impossible est devenu possible. La situation des milliardaires est « utopique » : mais elle existe. Ce qui n’est pas possible en France, que cela soit pour le meilleur ou pour le pire, est possible ailleurs. Rien n’est impossible, et, hélas, trop souvent, le pire. Or, pour aller vers le nouveau, comme le dit un célèbre vers de Baudelaire en conclusion de son poème, encore faut-il en avoir le DÉSIR, une volonté réelle. Or il faut bien le dire : parmi les « contestataires » de ce que sont les règles politiques françaises, il y a des faussaires : des conservateurs déguisés en révolutionnaires. Ils disent avoir des intentions, mais elles ne sont pas défendues publiquement, ardemment, et dès lors qu’il faut échanger et construire avec d’autres forces (tout ne se fera pas en un jour), ils récusent la première étape à mener, sur le principe du « tout ou rien », du « avec nous ou contre nous ». Aussi, pendant que nous restons stériles, la Bourgeoisie française construit, continue de construire, ses murs, ses citadelles, ses escroqueries, ses exploitations.
Concernant la mise en œuvre d’une telle démarche, puisque les partis français actuels sont liés à cette 5ème République, puisque les élections sont placées sous le contrôle de ces partis, qui ont, chacun, leur propre passif (à des degrés divers), il faudrait constituer une force politique populaire, appuyée sur les citoyens, militants, politiques, de la véritable gauche, celles et ceux qui sont engagés dans des associations, des organisations, des mouvements, syndicats, d’opposition à ce système actuel. Ensemble, ils devraient constituer une contre-assemblée nationale, dans laquelle ils choisiraient certain(e) s d’entre eux, afin de porter les revendications qu’ils/elles auraient choisies. Ce n’est pas une perspective simple. Outre la difficulté des moyens, il y a les sensibilités des uns et des autres, et il y a aussi les professionnels de la diversion/division. Car oui, il faut le dire clairement : autant à l’extrême droite et à droite, il n’y a aucun entrisme (qui accepterait d’aller perdre son temps au milieu de ces excités et agités du bocal ? !), autant il y a, à gauche, de l’entrisme, avec des individus qui sont chargés de saboter les forces qui se construisent. Le pire étant de la part d’individus qui ne savent même pas qu’ils réalisent ces sabotages, qui sont « sincères », sincèrement neutralisateurs. C’est un sujet qui n’est pas facile, parce que, dès lors qu’on l’exprime, certains n’hésiteront pas à hurler au complotisme, à la, mauvaise, défiance, alors qu’il s’agit d’être vigilant. Parce que, non, nous ne sommes pas tous frères et sœurs. Celles et ceux qui aident celles et ceux qui nous écrasent ne peuvent pas être des amis. Et aujourd’hui, la porosité induite par les moyens techniques et les réseaux sociaux ne facilite pas les choses, d’autant qu’il faut rester ouvert à celles et ceux qui sont vraiment nos frères et sœurs, qui sont animés par une bonne volonté.
Partant du principe que tout se tient, il faut, en conséquence de ces éléments, énoncer des perspectives programmatiques, lesquelles se dessinent clairement :
· Première mesure : la mise à l’abri, par un logement décent, de chaque personne actuellement à la rue, sans domicile
· Il faut impérativement mettre fin à la Constitution actuelle, mais pas seulement en se contentant d’y mettre fin, comme si mettre fin à un texte mauvais rendait nécessairement possible un meilleur texte. À cette volonté d’en finir avec cette Constitution, il faut coupler des principes (cette partie sera développée dans un second texte, mais des éléments importants sont exprimés ci-après). En lien avec cette Constitution actuelle, il faut mettre fin à la professionnalisation de la vie politique. Le CDD de la « classe politique » actuelle doit être achevé.
· Le contrôle et la limitation, dans tous les sens de ces termes, des flux financiers
· La fixation d’un salaire maximal par secteur
· L’empêchement, par une organisation concrète, d’atteindre et dépasser un milliard, de fortune personnelle, avec, pour les milliardaires actuels, l’imposition de leurs revenus afin de les ramener à un niveau inférieur à cette limite maximale. Un objectif : zéro milliardaire en France d’ici 10 ans.
· La hausse des plus bas salaires, pour récupérer les pertes subies depuis quarante ans ET le strict contrôle des prix, la liaison systématique entre salaires et profits, et, pour les organisations économiques sans profit (les associations), une contribution spéciale des finances publiques pour se substituer à cette absence, afin que les salaires du privé et les salaires du public et de l’associatif soient traités équitablement
· La semaine des 32 heures ou des 28 heures
· Un droit au travail effectif par un contrat de travail permanent, depuis les études post-bac
· Un droit au licenciement limité, par l’établissement d’une autorisation délivrée par des agents de la convention collective de référence ou par l’inspection du travail, sous des conditions elles-mêmes limitées, strictes
· La renaissance d’une véritable médecine du travail
· Le recrutement de plusieurs milliers d’inspecteurs du travail et le rétablissement de leurs droits antérieurs aux contre-réformes des 20 dernières années
· Attribuer aux travailleurs des parts sociales sur chaque organisation de production, qu’elle soit publique ou privée, afin d’associer les travailleurs à toutes les décisions essentielles
· Organiser les élections professionnelles nationalement, en une seule date, avec une mobilisation publique aussi importante que les autres élections
· La proportion des impôts et taxes en fonction des revenus, par l’augmentation des tranches et par l’usage des moyens informatiques (une TVA adaptée aux revenus)
· Une imposition annuelle en prenant en compte la participation de chacun à la vie économique, avec un chèque fiscal s’il y a le dépassement d’un seuil
· Imposer les entreprises à la source
· Des créations d’emplois, dans toute la fonction publique
· Le rétablissement des comptes pour le financement des retraites et l’augmentation de toutes les plus basses retraites de plusieurs centaines d’euros, comme, par exemple, pour les femmes dont les carrières professionnelles ont été courtes, en raison de la vie familiale et parfois professionnelle quand elles n’ ont pas été déclarées par leur époux/employeur libéral)
· L’ encadrement de la production et de la diffusion des publicités, la limitation de leur présence physique et immatérielle. L’interdiction de toute coupure publicitaire ou de toute présence publicitaire pendant la diffusion des oeuvres audiovisuelles. La création d’une déontologie sévère pour les concepteurs de publicité. L’interdiction de tout empire médiatique par un contrôle professionnel et civique des médias.
· Une réforme totale, de la base jusqu’au plafond, du système judiciaire, police et gendarmerie, comprises, avec une harmonisation, une mise en cohérence des peines (le viol devant devenir systématiquement un crime), la différenciation entre les délinquants occasionnels, petits et les criminels, avec, pour les premiers, des travaux de formation afin de les réintégrer en diminuant ainsi drastiquement le risque de récidive ; l’appropriation citoyenne de la police et de la gendarmerie, par un contrôle départemental de leurs actions, par des citoyens tirés au sort, pour un mandat déterminé, non renouvelable. L’orientation du travail vers la grande criminalité.
· La baisse du prix des cigarettes et de l’essence afin de ne pas peser sur les moyens financiers des Français modestes (même si toute la politique globale doit permettre qu’il n’y ait plus de grande pauvreté en France sous une à deux décennies), mais surtout pour que les citoyens consacrent une plus grande part à d’autres dépenses positives pour l’économie locale (permettre à chaque famille de revenir régulièrement aux « restaurants »)
· Faire du Ministère de la Culture l’ un des plus grands Ministères, avec la valorisation des artistes passés ET vivants (lier chaque école avec des artistes locaux, organiser des voyages scolaires vers des lieux artistiques, culturels, obliger chaque chaîne nationale à diffuser des programmes enregistrés et en direct, dans une proportion quotidienne importante, créer une chaîne des Arts, renouveler les principes des rémunérations des « intermittents » afin de les rendre réguliers et plus importants
· Une véritable réforme de l’Education Nationale, pensée et mise en œuvre par les travailleurs de l’EN, tant concernant l’ architecture, la désignation des disciplines que concernant les contenus scolaires, les manuels, avec, en Histoire, la fin du « récit national »… nationaliste.
· Organiser une grande conférence nationale, longue, entre trois mois à six mois, pour étudier et décider des mesures à engager pour réaliser une véritable protection de l’ enfance (l’enfant devant être reconnu comme un être à part entière, dont les parents biologiques sont des tuteurs légitimes DES LORS qu’ils sont capables de s’ occuper de, dès lors qu’il y a la certitude qu’ils aiment leurs enfants) ; mettre en place une formation obligatoire pour devenir parent
· Une véritable lutte contre le racisme, par une éducation à la fraternité : connaître les autres, vivre avec eux, est le meilleur moyen de rendre impossible le racisme ; augmenter les amendes et les peines pour les récidivistes du racisme. Mettre en place des « radars » virtuels pour constater toute expression du racisme en ligne avec une amende automatique.
· Engager une véritable réflexion sur l’état du vivant, sur les nouveaux rapports à mettre en œuvre entre les humains, le vivant, et notamment les animaux, avec la création de zones «sauvages» interdites à la présence humaine, la création d’ emplois d’ observateurs et de gardiens du vivant, la place des animaux dans la vie sociale
· Dans nos rapports avec les autres peuples du monde : tenter de réformer l’UE pour interdire toute « harmonisation », économique, laquelle signifie, en fait, imposer UNE UNIQUE politique, en outre, capitaliste OU sortir de l’ UE pour mettre en place une Europe des peuples, si ceux-ci le décident ; privilégier des accords internationaux basés sur les intérêts des populations ; mettre fin à la vente d’ armes et, en amont, à la production «libre et non faussée» de nouvelles armes ; mettre fin à la dissuasion nucléaire, en cessant de menacer des millions d’ êtres humains avec des armes de destruction massive ; réorienter les armées vers l’assistance aux populations frappées par des évènements climatiques ou une catastrophe (cet usage des forces « armées » aurait permis d’empêcher qu’il y ait tant de migrants qui perdent la vie en tentant de traverser une mer)
[…] les propositions qui se trouvent à la fin de ce texte […]
[…] le long texte concernant des réformes à effectuer en France, publié en amont des élections en […]